Découvert par hasard ce site helvète autour de l'Histoire des... voiries.
Pays-Suisse - Page 48
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Suisse, Via Storia ou l'histoire des voies
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Genève: histoire, palinpseste numérique et ... blogs
175 ans de la SHAG: historissimo !
Le précédent article de blog portait sur la Société Historique et Archéologique genevoise.
Il est complété ici.
Lors du colloque-Jubilé, la matière Histoire avait été abordée aux Archives d'Etat sous une pluralité très riche de facettes.
J'avais oublié de signaler une énième facette du rapport à l'Histoire: le fait que la société savante ait bien ouvert, elle aussi, son site internet:
http://www.shag-geneve.ch/2010/accueil.htm
Aucun doute, la recherche historique utilise déjà les outils numériques. Les archives se numérisent (base de données Adhémar à Genève). Les chercheurs et notamment les archéologues sautent aujourd'hui le pas de logiciels dédiés pour leurs approches méthodologiques.
Cette note signale toutefois non pas dans la méthode historique mais dans le champ d'études potentielles pour un historien genevois.... les blogs de la Tribune de Genève !
La blogosphère est un nouveau média. La Tribune de Genève offre cet espace de liberté absolue -sinon la barrière de la Loi en cas de diffamation- sans mettre d'ailleurs le nez dans les contenus des blogs.
(Nota en France les blogs de presse sont "validés" par les rédactions. Confirmé. Lire le commentaire de Rémi Mogenet dans cet article du blogueur HL)
BLOGOSPHERE: UN NEO MEDIA SOCIAL
Les articles numérisés sont de bons petits soldats qui ne meurent pas et rappliquent au doigt et à l'oeil. Toujours disponibles au moindre mot-clefs.
Ils vivent leurs vies car les moteurs de recherche les référencent en autonomes. On peut même les appeler sans entrer sur le site TDG !
TDG signale que le trafic induit par ses blogs hébergés fut de 5 millions de pages vues en 2012. On attend les chiffres 2013 avec impatience.
Remarque logique : la Tribune dite de Genève génère des blogs...de Genève.
De fait ultra intéressants pour la recherche historique locale dont celle de la SHAG.
Exemple: la dernière campagne électorale pour le Conseil d'Etat fut extraordinaire de ce point de vue: cela a ferraillé sec. Un conseiller élu par exemple Mauro Poggia- entre autres politiciens- étant lui même blogueur (Bloggia)
Les interventions des commentateurs furent innombrables.
PALINPSESTE NUMERIQUE EN META DONNEES
Au point que le futur historien de cette campagne électorale -pour ne citer qu'elle- ne pourra faire l'impasse de ce qui s'est passé sur les blogs.
Sinon son étude ne serait alors plus qualifiée de scientifique. La blogosphère TDG ayant bien été partie prenante du débat démocratique!
Ce qui fut écrit sur blog constitue une matière brute réflexive d'une richesse inouïe d'étude. Du social en pleine activité. Du contemporain en prise directe.
Mais se pose un sérieux problème. Comment appréhender la blogosphère comme champ d'étude? L'historien ne devra-il pas là encore changer, adapter voire inventer sa pratique??
Le palinpseste numérique n'est plus cette peau lentement grattée. Les pages blanches se remplissent chaque jour de mega octets. En mega-giga-supra quantités !
Pour aborder la gigantesque base de données, l'historien de demain devra complètement maîtriser lui même l'outil informatique spécifique aux blogs...
NOUVEAUX TERRITOIRES D'ETUDES
Accéder par mots clefs est facile.
Mais au delà comment "travailler avec"? Comment archiver ces méta données? Comment sélectionner les info pertinentes de celles non productives ?
La question du nombre de chercheurs se pose aussi. L'humain ne peut suivre ni la vitesse ni la quantité gigantesque d'octets !
Combien d'historiens pour analyser l'immense masse de ces données sociales de l'Histoire qui se fabrique réellement sous nos yeux, en temps réel ?
Ces débats d'idées essentiels pour comprendre l'air du temps.
QUID DU TRAITEMENT DE" L'HISTOIRE DES DONNEES NUMERIQUES"* ?
Sylvie Neidinger
SHAG : le-plus-ancien-editeur-genevois-encore en activité
*Au hasard des blog TDG, un nouvel élu exprime numériquement son premier mois d'expérience.
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175 ans de la SHAG: historissimo !
La vénérable Société d'Histoire et d'archéologie de Genève fête dignement son siècle trois quarts.
Avec comme gâteau une Exposition de documents visible aux Archives d'Etat jusqu'au 20 décembre prochain. Et pour cerise...le récent colloque intitulé: " L'historien et l'archéologue dans la cité " (15-16 novembre)
J'ai pu assister à la première journée du colloque (dommage pour la seconde...)
Le vocabulaire culinaire semble inadéquat: il faut parler de polyphonie plutôt !
Une séance introduite par Pierre Flückiger des Archives d'Etat.
L'Histoire abordée sous toutes ses coutures. Une formidable pluralité d'approches.
Tout d'abord, la SHAG se raconte elle-même (ses fondateurs, ses manques de locaux, ses statuts...) avec les exposés de Françoise Dubosson -qui indique comment un petit groupe se réunit autour d'Henri Boissier en mars 1838. Puis celui de Sarah Scholl laquelle a étudié les procès verbaux de jubilés.
Force de constater combien les membres d'origine se divisaient en deux visions: l'une calviniste classique et l'autre école dite "vieille genevoise" avec les J.B.G.Galiffe (des généalogistes) et autres anticalviniens.
Bernard Lescaze replace tous ces courants de pensée et resitue le radicalisme. Il évoque Henry Fazy, historien, archiviste et conseiller d'Etat.
L'aide "technique"structurante de l'historien et archéologue normand Arcisse de Caumont en direction de la SHAG fut citée. Mais pas seulement.
Furent abordées les relations avec les autres sociétés savantes helvètes.
L'exposé de Irène Hermann retraçait les interactions entre sociétés savantes suisses après la guerre du Sonderbund: pas si simple, pas si connectées entre elles en vérité!
HOMMAGE AU PRESQUE CENTENAIRE QUI PUBLIE TOUJOURS: PAUL GUICHONNET
Ce vendredi 15 novembre, le temps avait une épaisseur de siècle clairement mesurable.
Vertige. Puisque qu'un hommage verbal fut prononcé par Jean-Daniel Candaux ( président de séance très en verve) en direction du fils de Louis Blondel (1885-1967) très âgé mais assistant au colloque. Son père dirigea en 1913 le service du"Vieux-Genève"après des études à Genève, Paris et Munich.
Nombreux historiens présents dans la salle ont d'ailleurs évoqué dans les discussions leurs anciens professeurs à l'Université de Genève: hommage à la recherche universitaire.
L' approche mémorielle a été complétée par un hommage - vivant donc vibrant cette fois- pour le bientôt centenaire Paul Guichonnet qui publie toujours.
Magnifique paradoxe de Genève qui sait toujours privilégier la compétence au besoin et suivant les circonstances.
Elle installa tout de même à la tête de la SHAG, haut lieu de son historiographie locale majoritairement protestante cet érudit ...savoyard !
ARCHEOLOGIE=L'HISTOIRE EN COUCHES!
Dans l'après-midi sont intervenus les archéologues, ces historiens du concret.
Spécialistes de "l'Histoire en couches", celle à faire "naître à la Science" par les méthodologies de la fouille et des reconstitutions des données enfouies.
Deux archéologues de terrain ont pris la parole sans note aucune. Pierre Corboud retrace la naissance de la matière historique nommée"archéologie genevoise"de 1833 à 1920. L'exceptionnel harpon préhistorique sculpté du Salève et les palafittes.
Il précise comment se met en place au coeur du XIXème siècle une nouvelle science de l'histoire: la paléo-archéologie autour du lac de Neufchatel puis des autres lacs dont le Léman.
Et comment s'invente- en se nourrissant des données archéologiques- une symbolique nationale voire nationaliste autour du "suisse lacustre". Cet ancêtre, monté en mythe historique, que les peintres de l'époque ré-imaginent même.
La belle affaire: le lacustre helvète proto-historique avait le mérite de n'être ni catholique, ni protestant, ni germanophone ni francophone !
Une perfection théorique pour une Unité politique nationale en voie de construction..
Rapidement, ce concept d'ancêtre commun fondateur et reconnu par tous sera vite abandonné au fond des eaux de la théorie...Il connut tout de même son heure de gloire.
AVENIR DE SAINT ANTOINE?
Marc-André Haldimann et Jean Terrier ont évoqué les chantiers en cours à Genève:
-Rappel des premières fouilles du gallo-romaines du XIXème siècle gravement destructrices, les méthodes archéologiques n'étant pas encore adoptées.D'ailleurs, on ne sait même pas où sont aujourd'hui les amphores alors découvertes. Perdues, carrément !
-Description de l'immense chantier actuel du quartier Saint-Antoine qui permet une étude scientifique toute facilitée par les techniques modernes. Très intéressant d'observer l'appropriation par les genevois de leur propre passé puisque quelques uns expriment déjà le souhait de conserver les découvertes archéologiques en l'état.
Oui, certes. Mais en quel état justement ? A quelles couches temporelle poser le curseur?
Rappel: l'archéologue est un "historien fou" puisqu'il détruit son champ d'expérimentation au fur et à mesure qu'il ne l'étudie !
Très très proche-oriental ce fonctionnement inhérent à l'archéologie: un peu Chronos qui mange ses enfants ou alors Phénix qui s'auto-consume pour mieux ...renaitre.
L'archéologue cet historien paradoxal est réellement obligé de détruire au fur et à mesure son champ expérimental pour l'analyser.
Il procède à des choix de vie et de mort. Conserver ou détruire.
Politiquement, Genève est aujourd'hui devant ses propres choix dans le quartier Saint-Antoine: Conserver ? Que conserver ?
Comment détruire pour reconstruire? Les problématiques historiques sont toujours des enjeux contemporains de société.
Le colloque dans sa richesse a également porté sa réflexion sur d'autres facettes: la théorie générale de l'histoire.
Ainsi fut abordée la mode des années 80 (ouverture vers les sciences sociales, pluri-disciplinarité) autour du concept de l'histoire en miettes, voire de la "fin" de l'histoire (carrément !) Une vue de l'esprit plutôt que parole d'historien, semble-t-il. Une fausse crise de la discipline...
"Dépasser les apories du localisme"..."Faire varier le jeu d'échelle selon l'objet soumis à l'analyse"...
On conclue avec le concept de "variation d'échelle" indiqué par Marco Cicchini, organisateur, dans son ...introduction.
Ou comment l'histoire de Genève -somme toute celle d'une ville modeste en population au XIXème siècle - s'aborde aussi dans le cadre d'une l'Histoire plus large (helvète, européenne etc.) Il indique alors que c'est une question de ligne de crêts...
Crêts Baudet, assurément !
Sylvie Neidinger
Lire : Histoire de savoirs: 175 ans d'histoire et d'archéologie à Genève.
Catalogue de l'expo de la SHAG, visible aux Archives d'Etat de Genève jusqu'au 20 décembre.
Dernière nouvelle: expo prolongée jusqu'en avril 2014
Rue de l'Hôtel-de-Ville 1
Case postale 3964
CH-1211 Genève 3Dernière nouvelle ( mai 2014) les données de l'expo sont disponibles en ligne
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Genève-le plus long banc du monde:120,21 mètres- à l'envers !
Genève détient un record mondial: celui du plus long banc en bois de l'univers: 120,21 mètres portés par 61 pieds...
L'objet est long parce que la Promenade de la Treille est longue, tout simplement. Il en épouse la dimension.
Il n'est d'ailleurs là que pour les beaux yeux de cette charmante dame du 18ème siècle: la "promenade" urbaine, haut lieu social et socialisant.
Vénérable objet car présent depuis 1767.
Genève pour autant ne fait pas homologuer sa dimension hors norme dans le Guinness book des records.
Pas de compétition absurde qui verrait un quelconque Etat fabriquer un banc encore plus grand juste pour dire qu'il a battu la cité de Calvin ! (Rien de plus facile pour défier: juste du bois et un peu de métal...)
Non. La fonction de cet objet précise est d'une toute autre nature...
Il étonne à première vue par son orientation originale.
Il tourne carrément le dos au magnifique paysage panoramique de la ville, le parc, Plainpalais, l'Uni Bastions avec en fond de regard lointain le Vuache et le Salève en France voisine.
SYMBOLIQUE VOIRE... PSYCHANALYSE.... URBAINE ?
Ce banc couleur verte.....ne serait-il pas en fait une toute dernière trace symbolique des magnifiques bastions dans lesquels s'était enfermée Genève?
Une ligne Maginot imaginaire?
Souvenir de ces barrières de protection, signes du repli "entre soi"...que le XIX ème siècle a vu démolies pour donner sa nouvelle dimension internationale à la Ville-Monde.
GENEVE ENCORE HYPER SECRETE
Toute pré-occupée d'elle-même en paysage intérieur...
Mythique promenade tournée vers l'espace de jeu des enfants (son avenir) et vers ses Institutions (son présent) avec le Conseil d'Etat qui semble veiller avec soin sur les chers petits, depuis les baies vitrées.
L'espace de la Treille accueille d'ailleurs à chaque fin d'année scolaire les écoles de la ville. En raout de clôture d'une année méritante.
Il ne me semble pas délirer en comparant l'extraordinaire position du banc genevois tourné non pas direction open space mais vers l'intérieur, vers l'oppidum historique, vers de la Ville citadelle fermée telle qu'elle fut dans sa phase de splendide isolement insulaire.
Car un autre détail intéresse au plus haut point: la position des petits chevaux de bois ... frontalement placés face au panorama, eux ! De facto face au monde extérieur dont la Savoie.... Comme des sentinelles, là encore symboliques, en protection d'une mythique escalade.
Brave petits cavaliers et chevaliers de la Tour Baudet...
Ici, les petits chevaux ne se regardent pas entre eux, en vis à vis, comme dans tous les parc d'enfants du monde où les bambins jaugent leurs exploits à l'aune du voisin. Chevaux croisés.
Non, les petits cavaliers genevois sont tous en position de sentinelles. Leurs regard ne se croisent pas individuellement mais se tournent collectivement vers l'extérieur. En garde !
Etonnant.
BELLE RENCONTRE
Concrètement, l'usage du banc tourné vers l'intérieur est de facto incongru pour qui veut basiquement observer le paysage.
Se poser en lui tournant le dos ne sied pas forcément. Regarder avec une position corporelle inversée fait risquer un grave torticoli.
Nombreux sont ceux qui littéralement transgressent les gestes ordinaires. Ils s'assoient, en fait à l'envers et passent leurs jambes !
Il suffit en fait, sportivement, d'enjamber le dispositif dans l'autre sens et de transformer le dossier en ventral ! Jupes s'abstenir.
C'est tout de même hyper original (photo) mais bien l'unique méthode pour apprécier la vue panoramique.
L'autre jour, une dame d'un âge certain était justement en méditation dans cette position quelque peu saugrenue. Je m'approchai et lançai en imitation les jambes dans la manoeuvre si spéciale mais obligatoire ici.
Et toutes les deux de rire. Puis de plaisanter aimablement sur les particularités genevoises.
Après une demi-heure d'échanges sur la ville, passion commune visiblement, l'Inconnue me posa alors une surprenante question. "avez-vous 10 mn, je peux vous faire une surprise".
Oui évidement: j'ai même en réserve des heures pour les surprises...
Elle me demande alors de la suivre.
Elle habite un des palais historiques de la zone, bâtisse privée, totalement inaccessible à la visite. Dont la lourde porte s'ouvre sur deux magnifiques cours intérieures.
Hôtel particulier aristocratique, du protestantisme le plus ancien.
Genève architecturale ultra secrète...
Belle rencontre, grâce à l'humour.
Merci, le banc. Record mondial : 120,21 m précisément. Mesure garantie exacte au cm près. Précise, exacte: à la genevoise.
Sylvie Neidinger
Cet article est cité sur wikipedia à propos de la Promenade de la Treille: wikipedia.org/wiki/Promenade_de_la_Treille
crédit images photos Neidinger
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Etienne Dumont, critique d'art-oeuvre d'art
Etienne Dumont est connu comme le loup blanc à Genève. Mais pas tellement au delà, finalement.
Alors qu'il est l'un des hommes les plus transformés de la planète. Peut-être unique à ce niveau de tatouages. Il est journaliste.
Cette chronique concerne l'homme public. Le privé, je ne le connais pas. La vie privée n'aurait d'ailleurs pas lieu d'être sur un blog.
Nous avions croisé nos chemins une seule fois à Penthes (GV) en 2012 à propos de l'expo Corto Maltese. Il portait son petit bonnet. Peu loquace...(sa photo de blog ici : phase du noir) Lui, rédigeant un article de presse: Marco d' Anna sur les traces de Corto Maltese
Moi un article de blog: Marco d'Anna en escale à Penthes et Corto Maltese refuse de quitter Genève
Etienne Dumont est brillant rédacteur. Mais à la dent (trop) dure parfois. Sur le terrain genevois et vaudois, certains éditeurs ou galeries d'art m'ont dit être encore marqués par ses écrits à leur encontre, en positif comme en négatif. Je n'ai les ai pas tous lus et ne peux me prononcer. Sa plume hyper acérée en excède plus d'un.(article TDG 2017)
A savoir, la Presse n'est pas Communication! Le chroniqueur est bien dans son rôle en tant que...critique. Nuance toutefois. Qu'un journaliste n'apprécie pas une oeuvre ne signifie pas du tout que cette dernière soit "nulle"! Derrière une expo, un éditeur, il y a de l'humain. Des personnes qui se sont données autour d'un projet. Et qui n'apprécient pas que deux coups de cuillère à pot de plume ne ternissent leur travail.
Car, problème: l'écrit reste ! Il est ultra puissant. A l'heure des moteurs de recherche, les articles ne meurent pas. D'où ces sentiments mitigés toujours actifs longtemps après les parutions.
CRITIQUE CULTURELLE: LA DIFFERENCE PRESSE /BLOG
Ici s'expose toute la problématique de la critique du culturel. Car le journaliste est justement rémunéré pour s'exprimer en positif et aussi en... négatif. C'est son travail. Quelque part, son analyse engage celle de sa Rédaction dans le lien de subordination qui le lie à son employeur. Laquelle en retour le protège.
Le blog lui ne fonctionne pas ainsi. Pas de mécanisme économique. Le blogueur opère individuellement ses choix. Sur ce #BlogSylvieNeidinger par exemple, j 'ai choisi cette option pour les données culturelles: "je n'aime pas donc je n'en parle pas" L'activité blog est non rémunératrice, chronophage. Pas de temps à perdre à démolir...car déjà pas le temps de coucher sur écran la dizaine d'articles déjà pré-rédigés en tête. Ce qui n'empêche pas au besoin évidemment une critique. Mais pas de celle qui laisse l'autre cloué au tapis médiatique.
Presse et blogosphère sont deux planètes si proches et si différentes: pas toujours comparables!
I- Etienne Dumont, chroniqueur culturel:
On ne le lit plus sur la Tribune. Idem, son blog TDG est inactif. Sa dernière chronique fut rédigée le 7 mai dernier (cf 2013). "Tout a une fin" écrit-il sans en préciser les raisons.
Il exerce désormais à Bilan.ch
Ici sa photo professionnelle, sur le site de presse Bilan. Drôle d'indien, étonnant journaliste. Peu habituel.
Il publie le 22 mai 2023 un bilan décennal de ses 6000 chroniques et de son métier de journaliste critique d'art. où il présente d'ailleurs son métier de façon décalée avec autodérision quelque peu péjorative "Né en 1948, Etienne Dumont a fait à Genève des études qui lui ont été peu utiles. Latin, grec, droit. Juriste raté, il a bifurqué vers le journalisme. Le plus souvent aux rubriques culturelles, il a travaillé de mars 1974 à mai 2013 à la «Tribune de Genève», en commençant par parler de cinéma. Sont ensuite venus les beaux-arts et les livres. A part ça, comme vous pouvez le voir, rien à signaler"(Bilan)
II Etienne Dumont oeuvre d'art
L' homme est probablement le plus tatoué de la terre (exploit) et oeuvre d'art, lui-même! Il s'est exprimé publiquement en 2009 sur son processus de transformation démarré par un aigle et une croix, soit, du basique, pour arriver au résultat sophistiqué que l'on connait aujourd'hui.
Avec un graphisme ethnique très sphère culturelle océan pacifique pour le visage (Maori?) et Japonisant pour le thorax. Et plus encore.
Son être est devenu champ expérimental. Le blanc par exemple ne tient pas sur la peau, il vire au jaunasse "sale" selon lui. Il quitte donc le blanc/noir pour le ...rouge.
Le critique professionnel témoigne sur le site d'une certaine Annette Giard en février 2009 (textes en bleu):
"j’avais vu au Musée d’Orsay, lors de l’exposition sur les moulages, le buste en plâtre d’un Néo-Zélandais, au visage couvert d’incisions soulignées d’encre. Longtemps, j’ai pensé à cette chose, sur ma table de nuit imaginaire, puis j’ai téléphoné à Dominique Lang [son tatoueur] : “On le fait.” Il n’était pas chaud. On l’a fait, en couleur. Ça m'embêtait d’avoir de la couleur sur le corps et la tête en noir et blanc, c’est comme si j’étais deux personnes. Alors on a tout refait en couleur. Ça a pris 10 mois, en tâtonnant. Il se passait toutes sortes de choses bizarres pendant les séances. Quand il plantait son aiguille dans les ailes de mon nez, par exemple, ça déclenchait des éternuements. Il fallait s’interrompre toutes les 10 secondes.Il a offert son corps jusqu'à la nudité au regard public en 2009 par une expo de photos. (article Libé) Il fêtait ses 60 ans.
Mais sans donner d'explication verbale véritable. Le cliché plus haut le présente en mode avant/après. Depuis son visage s'est encore complexifié.
Après tout, face à une oeuvre, le spectateur de la photo ou de la toile doit lui-même se poser la question du pourquoi. L'Art sert bien à cela...L'artiste n'a pas à verbaliser ses choix !
Silence d' Etienne Dumont sur les motivations du recouvrement presque complet de ses cm de peau.(dont la superficie se calcule par une formule dite de Dubois qui daterait de 1916 en fonction du poids et de la taille.)
La peau cet épithélium de revêtement, résistant à l'abrasion et la dessication par sa couche cornée, cette enveloppe humaine, peut atteindre 2 mètres suivant les individus.
Le genevois reste fondamentalement silencieux sur les motifs de cet acte de transformisme majeur. Est-ce une barrière de protection? Un outil de provocation? A-t-il des soucis médicaux autres que la nécrose qu'il avait signalée à propos de sa corne de par le recouvrement complet? Son témoignage sur les réactions qu'il engendre, en Suisse, à Paris ou dans les pays qu'il visite? Quid des passages en douanes? Les enfants le prennent-ils pour un personnage de BD vivant lorsqu'ils le rencontrent ? Un extra-terrestre?
Quel est le lien entre l'encre de la plume du journaliste, l'encre du tatouage et l'ancre symbolique si présente chez les tatoués? Que pense-t-il de la notion de trace culturelle ? Narcissisme ? Auto mutilation symbolique? Ou au contraire hyper-valorisation de l'ego ?
450 HEURES DE TATOUAGE SUR 15 ANS
Expérimentation corporelle qui le fait éternuer, tousser suivant les emplacements lors des longues séances...
Définition de tatouage sur wiki :Le mot vient du tahitien tatau, qui signifie marquer, dessiner ou frapper et dérive de l'expression « Ta-atouas ». La racine du mot, ta signifie « dessin » et atua signifie « esprit, dieu ». Le docteur Berchon, traducteur du deuxième voyage de Cook vers Tahiti en 1772, employa pour la première fois le mot tattoo ; le mot sera francisé en « tatouage» à la fin des années 1700. Il est d'abord introduit dans le Dictionnaire de l'Académie française en 1798, puis dans la première édition du dictionnaire de Littré en 1863
Au Japon, le tatouage traditionnel pratiqué à la main est appelé irezumi (入れ墨 ou 入墨, irezumi, littéralement « insertion d'encre ») le terme plus général pour désigner le tatouage est horimono (彫り物 ou 彫物, horimono, littéralement « sculpture »
(suite- A Giard):"Il est recouvert d’encre de la tête au pied, à la seule exception des paupières, des parties génitales, de l’anus et de la paume des mains et des pieds. Etienne Dumont porte en outre, sous la lèvre, une sorte de hublot qui montre la racine de ses dents et ses gencives. Ses oreilles sont ornées de gigantesques disques, pareilles à des décorations primitives. Il s’est fait implanter deux gros anneaux de métal qui apparaissent en relief sur le dos de ses mains. Au-dessus du front, un pédoncule semblable à un oeil globuleux d’extra-terrestre pointe comme une antenne. A l’origine, il avait deux “cornes” sur la tête. Une nécrose foudroyante l’a obligé à se débarrasser de celle de droite. Ce qui l’énerve : il aurait voulu être symétrique. Mais les lois du corps n’ont rien à voir avec l’ordre et la raison.
“J’ai appris avec ces modifications qu’il ne fallait pas avoir de plan pré-établi, dit -il. C’est peut-être la principale leçon qu’il y a à retirer d’une telle démarche. Il faut accepter d’avoir la partie droite du corps moins bien irriguée (c’est le cas pour la majorité des gens), donc moins apte à subir des modifications extrêmes. Dans le lobe de mon oreille gauche, je porte un disque de 7 cm de diamètre. Le disque de droite fait seulement 4 cm. Sur le visage, je porte un tatouage qu’il a fallu rendre dissymétrique pour qu’il ait l’air symétrique : il y a plus de lignes d’un côté que de l’autre, mais ça ne se voit pas justement. Il faut donc tricher avec les parties droites et gauches du corps. Mettre au point des illusions d’optique. J’ai l’impression d’avoir passé des années à assembler un puzzle.”
Véritable oeuvre d'art que son corps puisque les tatouages sont pensés en ...illusion d'optique! En puzzle. Avec tous ces accessoires étonnant incrustés : cornes, piercings, labret...
UNE TABLE DE NUIT IMAGINAIRE COMPOSEE
"Bien que son corps ne corresponde pas à un projet artistique global ni prémédité, Etienne Dumont en est plutôt heureux. “Je l’ai fait comme quand on se promène dans un pâtisserie, explique-t-il. J’ai dit : “donnez-moi ça, et ça, et ça”. Il y a du tribal, du cyber, des estampes d’Hokusai (sur la cuisse droite, ça représente un viol, un monsieur agresse une dame, mais je l’ai choisi juste pour l’harmonie des couleurs et des volumes). Il y a aussi des crânes inspirés par des natures mortes hollandaises, des pivoines et des chrysanthèmes… On a essayé d’harmoniser le tout. Je n’attache aucun sens particulier à ces images. Il n’y a pas de symbolisme. Je n’ai fait tout ça que pour le plaisir. Et je ne me croyais pas capable d’aller jusqu’au bout. Vous savez, quand on dit aux gens : “Ce corps, c’est 450 heures de tatouages répartis sur 15 ans”, ils reculent devant ce que cela représente. Moi aussi, j’aurais reculé.”
Il se défend d’accorder à son corps une autre valeur que celle de simple support à des expériences, il avoue qu’il y a quelque chose de la parade amoureuse dans ce déploiement de couleurs et de formes outrancières. “Quand on est dans mon état, on n’entre plus quelque part, dit-il. On fait une entrée. Je ne peux plus la jouer modeste maintenant. Alors j’y vais. Et j’essaye d’avoir le bon mot."
ETIENNE DUMONT DEVIENT UN INCROYABLE CHAMPS D'EXPERIMENTATION DE LA PEAU SOCIALE.
Comme critique d'art et de culture il tire des observations de son état:
"Parfois, quand des hommes me regardent, je me demande s’ils ne sont pas intéressés par moi. Il y a une ambiguïté. Mais souvent, non, ils ne me draguent pas. Ils sont juste curieux. Parfois, j’oublie mon apparence. Je n’y pense pas vraiment. Je vis avec. Parfois, j’ai l’impression d’être dédoublé. Il y a mon corps et moi derrière. C’est comme un jeu de cache-cache.” Dans la rue, ceux qui réagissent mal sont généralement des immigrés, des gens qui essayent de s’intégrer et qui trouvent choquant de vouloir sortir de la norme. En revanche, les vieilles personnes sont toujours complices. Elles approuvent. “Comme les vieux se sentent exclus, ils font preuve d’empathie avec ceux qu’ils pensent dans les marges, explique t-il.
Etienne Dumont induit par son apparence choisie des questionnements fondamentaux sur le normal et l'anormalité humaine. Le "choc culturel" proposé par le journaliste tatoué, portant labret et cornes intégrées est un acte de création, de réflexion théorique, sociologique proprement extraordinaire.
Il se joue du social, sans visiblement en souffrir. Plus intellectuelle comme action tu meures ! Ou plus inconsciente?
A se demander même si son intellect dirige réellement les opérations ?
Ou si cette orientation vers ce dédoublement entre l'interne- la peau frontière et le monde extérieur se fait à son corps défendant ou non....
Etienne Dumont a créé un puzzle, un labyrinthe si compliqué. Déroutant, déstabilisant pour le "voyeur" par lui sollicité de facto. C'est à dire nous tous, le champs social.
Tatouage ultra sophistiqué. Probablement destiné à perdre le regard de celui ou celle qui ose poser son oeil sur lui pour l'introspecter. Dans un magistral mécanisme de défense ?
Comme une peau-paratonnerre ?
Ou bien parade amoureuse du paon ou autre oiseau rare, en magnifique plumage rouge?
Ou les deux dans un "double-je" ? Double jeu avec le regard de l'Autre à qui il impose impérativement d'être en position de voyeur! Définitivement.
Sylvie Neidinger
Article révisé en octobre 2023. Liens obsolètes éliminés
Etienne Dumont, critique d'art-oeuvre d'art - Le Blog de Sylvie Neidinger (blogspirit.com)