"Une fête que l'on appelait ahatine...." page 163 "Le Chevalier à la Charrette".
Version en français moderne chez Albin Michel par Claude Duneton, Monique Baille issue des thématiques de Chrétien de Troyes (qu'il est hyper intéressant de lire, relire en direct aussi. Donc en ancien français)
Je ne résiste pas au partage de ce vocabulaire qui m'était totalement inconnu : "ahatine" appliqué à une fête????
Qui en sait un peu plus? Enquête...
Une trace (légère) sur le wiki français : "Une fête avec concours" . En l'espèce dans notre texte on peut comprendre "une fête avec organisation de tournois."
Le wiki anglais est finalement plus explicatif à la rubrique "old french" !!! (Thanks!) Et confirme le côté compétition voir compétition armée de ahatine. Comme il s'agit d'une fête, on comprend une organisation de tournois, festive néanmoins combattante
"Le tournoi regroupe un ensemble d'épreuves équestres ou pédestres au Moyen- Âge.Il est pratiqué en Occident entre les IXe et XVIe siècles. L’apogée des tournois se situe dans les années 1125-1225.Les enjeux en sont parfois courtois (on se bat pour une belle ou sa couronne de fleurs), pour de l'argent et parfois aussi symboliques, mimant ceux d’un véritable duel ou d’une guerre en réduction. Outre l’entraînement militaire, il est l’occasion de faire preuve de sa valeur et pour les meilleurs combattants, de s’enrichir, grâce aux armes des chevaliers vaincus et aux rançons versées par les prisonniers".
"Et quand ce vint a l'enjournée
refut la gent toute atournée
si s'en vinrent à l'ahatine
en loge refut la reine
et le dames et les pucelles
si eut chevaliers avec elles" (p175 Duneton)
L'Université d'Ottawa dans son dictionnaire électronique de Chrestien de Troyes évoque le terme bien identifié avec le sens de tournoi et de rage de vaincre. Il et propose une variante orthographique: äatine, hatjan
La construction an/hatine se lit en lexicologie comme an/hardir, ce qui donne le double A.
La lecture : "s'en hater" : se presser...pour vaincre vient à l'esprit. Mais la notion d'empressement s'apparente ici plutôt à la rage...de vaincre. Aatiner exprime le harcèlement. Aatir le défi. Les définitions du dictionnaire Godefroy le confirment.
L'empressement-notion de temps-est bien lié à cette définition guerrière (en finir au plus vite, ne plus pouvoir attendre)
L'article "hatjan" de Atlif évoque lui un germanisme avec les notions précises guerrières, de défis mutuels, de paris, impétuosité, de déclaration en défiant de prouver le contraire, de provocation jusqu'à la haine.
Cela s'apparente hors tournois aux déclarations belliqueuses avant un conflit.
La lecture suivante 's'en hainir" serait au final la racine.
La langue anglaise [mélange elle aussi d'ancien français et de germanismes] comporte la réponse avec le verbe "to hate" : haïr.
Hate De l'ancien français haste (« empressement, précipitation »)1135, du vieux-francique * haist (« violence, véhémence ») (cf. ancien haut allemand heisti « violent »).
Dès lors, la fête a/hatine: pour mieux " haïr" par joute et défis par provocation au combat.
Sylvie Neidinger
RUBRIQUE VOCABULARIA vie des mots