Bloguer participe du pur bonheur. Mais les conditions de l’exercice ne sont pas partout identiques. En Suisse, l’inscription est simplissime. Il suffit sur la Tribune de Genève d’une adresse courriel, physique, un numéro de téléphone. C’est déclaratif, non vérifié (jusqu'à ce jour). Et hop le tour est joué….Confiance accordée a priori.
Ensuite, place à la liberté d’expression avec comme seules frontières les limites légales : ne pas diffamer, pas d’arrière-plan commercial caché.
Ces règles évidentes étant respectées, le blogueur ensuite cuisine sa sauce comme il l’entend !
La technologie moderne le rend carrément démiurge. Il fait tout. Choix du sujet, de la documentation, prise d’infos, mise en pages : à la fois journaliste, rédac’chef, photographe, secrétaire de rédaction etc. Pour coller à l’actu ou non, de la photo, du son et les essentiels liens hyperweb. En version blog.
Il joue au commercial aussi: désormais, le blogueur va devoir pratiquer le « pushing » d’article pour démultiplier sa visibilité par Facebook et Twitter.
« Version blog » signifie que la personnalité du blogueur s’expose à la Lumière, au scanner de la blogosphère. Il entre alors dans ce nouveau web-media massif avec ses choix, ses goûts, ses humeurs, ses noirceurs, ses luminosités, ses scoops, sa sensibilité, ses combats intellectuels, ses esthétiques, ses retenues, ses non-dits.
Lectorat désormais embarqué dans son équation de réussite. Laquelle se mesure par les statistiques quotidiennes.
Ce blog Neidinger fait depuis ces derniers mois un bond quantitatif (en visiteurs et nombre de lectures) Bon signe.
Normal. Car tout est cousu main. Du cuisiné maison. Des plats élaborés en fonction de ce qui a mûri au jardin. Au jardin secret, en fait.
Le choix des thèmes reste varié. Mais avec un socle évident : rechercher de l’info ….genevoise. Par déontologie : aucun commentaire sur la politique suisse. (Ils sont si nombreux sur TDG à vivre cette passion avec compétence...)
De Genève, ce blog adore l’info sociale ou culturelle : galerie d’art (Red Zone par exemple) expo photo Marco d’Anna au Musée des Suisses dans le Monde à Penthes, Barbara Polla pour la littérature et globalement la rubrique bien suivie nommée Lire… Sans oublier la lettre à Jean-Jacques Rousseau l'indigné- il fallait oser- le jour du tricentenaire.
Au-delà, sur ce blog : analyse politique hexagonale, ou internationale dont une série avec un angle original sur… le printemps/hiver islamiste. Un point de vue de « l’intérieur » de la Syrie, différent de ce que les médias servent depuis le début. A propos de cette Série Surya, une dizaine d’articles sont pré-rédigés en tête depuis trois mois. Mais ils ne « sortent » pas. Blocage. En raison de la... guerre de religion qui fait rage dans ce pays avec l’aide occidentale, turque et des pays du Golfe.
[A Genève, on sait ce que signifie une guerre de religion. Voir ses biens réquisitionnés en raison de sa foi, s'exiler en raison de sa foi. Etre égorgé pour sa foi...Ce, en 2012-13! Syrie en processus d'irakisation. Blocage. Larmes de sang. Encore mieux dit dans la langue adéquate, celle de la tauromachie: lagrimas de sangre]
Le plus surprenant de ce blog Neidinger est d’avoir sans honte osé démarrer la caricature. Dommage que les talents de dessinateur ne soient pas au rendez-vous!
Avec un vrai coup de crayon, une vocation de redoutable caricaturiste de presse aurait émergé. Car très souvent, je me réveille avec en tête un dessin d’actu qui malheureusement ne peut se concrétiser par inaptitude au dessin.Tant pis. Je ris toute seule. Pas grave. Mes caricatures, celles qui ont tout de même franchi la barre de la réalisation physique sont bien trop naïves. Mais elles ont le mérite…d’exister. Et strictement grâce au blog. Nées du blog. Oui c’est bien lui qui a généré ces quelques sourires de presse. Fantastique blogosphère.
*BLOGS DE PRESSE COMPARES ENTRE FRANCE ET SUISSE
Esprit concret, jamais impressionnée par « ce qui se dit » toujours attentive à gratter le réel au scalpel- le vrai, le quotidien, le vécu, ce qui est masqué par les discours, la réalité du terrain- j’ai mené un petit exercice journalistique hautement significatif.
Tout simplement aller tester le processus de création d’un blog de presse, côté France. Je précise bien blog de presse, associé à un média reconnu, existant. Pas un blog ordinaire (celui qui s’ouvre comme on créé une adresse mail et qui peut rester sans aucune visibilité)
1- Côté blogs de presse France: véritable choc suite à la tournée des popottes : aucun d'accueil pour monsieur ou madame tout le monde !
L’Express ne répond carrément pas à ma demande. Observation : les blogs Express sont en fait des blogs de journalistes et de spécialistes avec même un usage de marketing interne. Une blogueuse y donnait ce jour là une recette de cuisine. En cliquant, le lecteur se retrouvait dirigé vers les pages féminines, déco de la rédaction web !!! Lire ici les conditions sur Express Yourself " "les meilleures contributions sont vérifiées, retitrées etc..."
En France, une majorité de titres de presse suivent ce schéma d’ouvrir les blogs en premier lieu à leurs…. journalistes. Comme l’éditorialiste pour Figaro, Yvan Rioufol. Ces plumes, ces noms de caractère génèrent du trafic assuré. Aucun risque.
A ces pros de l’écriture sont associés en second lieu des « Experts » ces blogueurs invités non rémunérés comme pour Huffington Post version française.
Remarque : en terme de vocabulaire, on parle souvent de note, de post comme si ce qui était publié sur blog n’était pas un article... Ne mélangeons surtout pas les torchons et les serviettes! La "grande presse" adore faire venir les contributeurs, gratuitement. Mais de là à ce qu'ils se voient positionner en égalité avec le monde du journalisme, ne serait-ce que par le vocabulaire qui les désigne, certainement pas ! Pourtant cela se nomme...espace de débat!
Sur Nouvel Obs, le travail du "chroniqueur associé" est tellement digéré que le temps de lecture de la note de blog est calculé !!
Il y a sélection du blogueur par le média. On observe donc dans l'hexagone une différentiation politique entre une blogosphère de gauche et une de droite suivant le positionnement idéologique du ....média qui héberge. Lire cet article du Monde daté du 26/12/12
Rue 89 a eu l’amabilité de me répondre. Le modèle économique de ce « pur player » basé sur la pub n’a pas bien fonctionné. Ils ont été rachetés par le Nouvel Obs et ne décollent toujours pas.(Seul Médiapart avec son système d'abonnement semble avoir trouvé la voie économique.)
Rue 89 repose sur la trilogie « journalistes/experts/ blogueurs acceptés » Blogueur associé ne signifie pas l’acceptation du tout venant, de vous et moi, comme sur la Tribune de Genève. Ici "associé" signifie clairement : sélectionné, invité, coopté...
Ce n'est pas spécifique à Rue 89: cela fonctionne ainsi en France, visiblement-sous réserve d'un contre-exemple, non produit à ce jour.
En réalité, le « blogueur associé » que ce soit chez rue 89, Nouvel Obs, le Monde etc. n’est en fait PAS LIBRE. Pas au sens « Tribune-de-genevien » du terme ! La présence du blogueur est systématiquement validée en amont. Tout le monde ne peut bloguer! Il doit dire qui il est et en quoi il va intéresser le média. Ensuite chaque article sera obligatoirement soumis à relecture par la rédaction avec acceptation ou non. La rédaction du média valide ou non.
Idem lire les conditions du Lab. Toujours une rédaction qui ...sélectionne jusqu'aux commentaires :
Une méthodologie française à faire frémir les blogueurs TDG qui s’étripent, ferraillent joyeusement sur la Tribune, quotidiennement et en toute liberté !!!!!!
Le contrôle de contenu français certes garantit un contenu rédactionnellement normalisé ( orthographe etc...)
2-Côté blog de presse en Suisse, n’importe qui peut s’inscrire (à date de rédaction de l'article) Pour preuve l’avertissement actuellement posté sur site TDG : tous les blogueurs ne sont même pas encore identifiés (5% encore inconnus!) Lire :
En tous cas, les blogs TDG bruissent de la passion suisse pour le fait politique. Campagne électorale quasi permanente. Cette véritable « addiction » locale génère une effervescence entre hommes politiques, partis, citoyens qui les provoquent, les questionnent sur blog, par commentaires. Libres jusqu’au bout. Aucun modérateur officiel de contenu sur TDG car le blogueur est tenu responsable des commentaires qu’il publie. Comme c’est vivant !
La liberté genevoise fait que les extrêmes existent et se répondent. Car pour se répondre, les idées doivent s'exprimer !!! Le plus pro-israélien côtoie le plus pro-palestinien. Toutes les idées s’exposent pour mieux se confronter en joutes verbales. Là où le média français prédigère c'est-à-dire décrète ce qui doit se lire et s’écrire. Et trie en amont. Laisse passer ou non. Censure, en fait.
Il y a du tirage quelquefois sur la Tribune de Genève. Les esprits s’échauffent grave...
Le responsable des blogs entre alors dans le jeu, fronce sa moustache. Rappelle les règles. Menace de supprimer les comptes de ceux qui dépassent les bornes. Les commentateurs, les blogueurs s’en mêlent en réponse. Ils apportent leur grain de sel, leur acidité, leurs ignorances, leurs erreurs, leurs préjugés, leurs compétences, leurs éclairages, leurs compléments. Ils soutiennent ou vilipendent.
Cela bataille sec. Et puis finalement tout s’autogère. Sublime en termes de démocratie !
La prise de risque de la Tribune de Genève n’accorde permet à cette blogosphère là de vivre en Liberté c'est-à-dire au final de générer des articles que nous n’aurions jamais pu lire ailleurs.
*SUISSE FRANCE : SYSTEMES POLITIQUES COMPARES :
De cette petite observation de blogosphères comparées, je tire des conséquences sur la nature différente des types de démocraties.En sémiologie un détail peut expliquer tout un système. Tout comme en psychanalyse, un simple lapsus linguae porte signification, révèlateur d’un global.
1- Côté France, le slogan national « liberté, égalité, fraternité » se conjugue bien mais… à sa manière.
La blogosphère révèle que le citoyen peut difficilement s’exprimer en direct. La parole de base est hyper "médatisée" au sens de "représentée". En premier lieu par les médias bien nommés ces " médiateurs" traditionnels qui offrent le prêt à penser. Ils trient l'info et la prédigère, notamment pour les choix de ce qui va faire la Une.
Pour "garantir la démocratie" en amont (toujours en amont!) la France tient à ce que tout le nuancier des pensées politiques soit offert au public par son intermédiaire. C’est la raison pour laquelle l’Etat (donc le contribuable) subventionne, finance la presse de tout bord, d’une façon massive. Presse nourrie par l'Etat à hauteur de 1 milliard par an au titre du fonds de soutien! Financements publics uniques dans le monde occidental qui choquent.Lire article de Pierre Chappaz sur économiematin.fr ( intéressante comparaison presse Suisse/France)
Autre article du même Chappaz intitulé "la presse française doit sortir de l'assistanat"qui fait un intéressant comparatif avec la presse helvète :
"La presse romande se porte bien mieux que la française. Il y a pas loin d'une dizaine de quotidiens en Suisse Romande pour seulement un million et demi d'habitants ! Des deux côtés de la frontière, la presse subit la concurrence d'Internet. Alors, pourquoi la presse est-elle dans ce triste état en France, et va-t-elle mieux en Suisse ?La première différence qui saute aux yeux, c'est que la presse française est sous perfusion de l'Etat. Et si c'était là la cause de sa déchéance ? Pour s'attirer les bonnes grâces des journaux, les gouvernements français successifs accumulent depuis 1945 les aides directes ou indirectes. Les subventions et autres fonds de soutien représentent au total plus de 10% du chiffre d'affaires des medias, soit plus d'un milliard d'euros par an. Sans compter la très controversée niche fiscale des journalistes, qui peuvent déduire 7.650 euros de leur revenu imposable. Un tel niveau d'ingérence étatique dans la presse est unique dans le monde occidental."
A propos , la rédaction de ce web media (economiematin) m'indique que les blogueurs sont les bienvenus et que "le filtre y est mince".
Résumé du paradoxe: l'Etat français entend garantir les conditions de la démocratie en organisant lui-même, centre du pouvoir, les viabilités économiques des supports de presse.
La presse française est une presse d'opinion (différente en cela du média anglo-saxon) comme intermédiaire qui explique l'actualité et le réel au bon peuple. Une profession se pose en médiateur et décide du contenu.
Observation..... la blogosphère de presse reste en fait sur le même schéma!
Ce mode de faire est typiquement hexagonal. Un spécialiste comparait la France au Japon comme étant deux sociétés de caste sous une apparence républicaine, avec les malaises induits (taux de suicide élevé, consommation de calmants élevée) Pas faux! Et cela explique les explosions sociales typiques de ce pays. La France élit tous les 5 ans son monarque républicain qui prend la tête d’une pyramide de commandement. Comme sous l’ancien régime. Problème : le fonctionnement réel de cette société diffère bien de l’image qu’elle donne d'elle-même! L’Education Nationale en pratiquant l’élitisme républicain entretient le système. Echec total : des milliers de jeunes quittent l'école sans diplômes alors que quelques- uns vont intégrer les cursus hyper sélectifs. Pour mettre en place, ensuite ces corps intermédiaires administratifs qui décident pour les autres, au nom des autres. L'ENA, une école d'administration étant présentée comme le top en France. Symptomatique.
2- Côté Suisse, cette liberté d'expression sur les bords du lac pourrait avoir comme première explication le protestantisme. Vrai en partie. En partie seulement. Car la liberté d’agir en tolérance peut aussi se rencontrer chez les bouddhistes, les catholiques etc.
Il faut creuser l’explication. Suggestion: liberté et tolérance existent tout simplement car Genève est …en Suisse !
Le protestantisme serait venu s'installer sur ces rives ( Valdo puis Calvin) parce que le terrain d’accueil d’origine était lui-même tolérant.
Le canton, selon moi, explique….tout. Un peu comme un blog, unité basique différenciée au sein d' une communauté de blogs?
Le centralisme jacobin réducteur des différences locales n’a pas sévi en Helvétie. Chaque canton adore cultiver sa différence( au sein de la même langue parlée, le romand, des nuances de parlers s'expriment entre deux cantons distants de 50 km …)
La Suisse, démocratie parmi les plus anciennes d’Europe a très tôt développé son« vivre ensemble politique"
Une comparaison du corps social helvète s’impose avec le corps au sens médical. Chaque canton est une unité de base que la différence ne gène pas. Tout comme les cellules différenciées: cellules osseuses, hépatiques, sanguines….Chacune dans sa spécialisation a pour mission de faire fonctionner le corps global en développant des contacts communs, au-delà. Cela passe par des messages chimiques, hormonaux, électriques de communication.
En politique cela se nomme « consensus » et aboutit à la « neutralité »
Chaque canton suisse cultive sa différence et sait en même temps communiquer avec les autres si différents pour un résultat global positif. Là se situe exactement la notion de "confiance" accordée à un tiers.
Tout passe par la palabre. D’où l’immense attrait pour le fait politique observé sur les blogs de la Tribune de Genève. Un temps immense consacré à la parlotte. Mais pour quel résultat ! L’ordre ne vient pas d’en haut. Ou s’il vient d’en haut (instances fédérales) il doit subir la longue validation horizontale. La décision finale résulte du consensus. Même après des mois de blocage éventuellement. Le système présente ses inconvénvients de lenteur évidemment.
Les étrangers ne comprennent rien à la Suisse s’ils n’ont observé cette passion locale.
Décréter rapidement que la neutralité suisse serait une "absence de positionnement de la part de gens incapables de prendre une décision" est une erreur totale. La neutralité résulte de discussions politiques les plus affirmées, les plus rudes, les plus longues, les plus paralysantes. Elle se base sur la tolérance par l’intégration consensuelle d’idées a priori différentes.
Pour cela,simplissime: en amont les idées diverses doivent en premier lieu s’exprimer en toute démocratie.
Vive la blogosphère suisse !
Sylvie Neidinger
Merci à l’hébergeur TDG. Bonne année 2013 à tous
POST de février 2013 !!!!!TDG désormais demande à tout nouveau candidat blogueur d 'expliciter son projet de blog et de bien signifier qui il est, à la rédaction. Ceci dit dans le fonctionnement ultérieur, le blogueur garde toujours sa liberté d'expression écrite telle que citée plus haut.