L’espace genevois de « co-working » rue de la Muse, Plainpalais, accueillait mardi 20 novembre dernier la remise du prix littéraire Webstory.ch.
La plateforme d’écriture sur internet, lancée lors du dernier Salon du livre de Genève a réussi son pari. Plusieurs « webwriters » bien inspirés ont envoyé leurs textes .14 au total. Ecrits lisibles en ligne.;
« Requiem pour Sandy » Aydan, a reçu le 1er prix Ont été également honorés : Thierry Villon, Camille et Carmen Chamorel.
Helèna Zanelli, la fondatrice du site a réussi, en chef d'orchestre, à mobiliser un jury d’exception des Lettres suisses romandes avec l’écrivain Nicolas Couchepin (pas très web mais très très lettres) Barbara Polla en pool avec Michka Comtesse, artiste peintre et Fanny Arminjon opticienne et grande lectrice.
Après la lecture d’extraits par une souriante Mazala Tajmouati, Barbara Polla, que l’on ne présente plus s’est exprimée (galeriste, médecin,écrivain, chroniqueuse pour de nombreux magazines, notamment sur Les quotidiennes. Elle vient de publier son dernier livre «Tout à fait femme» aux éditions Odile Jacob)
La grande dame genevoise a affirmé combien le texte primé qui traite de l' agonie était puissant.
Elle s’est ensuite livrée. En effet, elle a évoqué son propre processus littéraire et par là a balisé les pôles de la différence entre un texte de témoignage et une œuvre d’art.
Un jour, sa propre mère lui demanda de l’aider à coucher sur papier ses souvenirs. Et l’auteur-médecin-galeriste-féministe-ancienne politique de nous décrire comment la relation de travail, personnelle entre les deux a évolué. Comment au final de banales anecdotes se sont transcendées en texte littéraire (son premier ouvrage) qui a sublimé la banale mémoire familiale. Par l’écriture.
Elle a partagé –et découvert- les instants de vie de sa propre mère normalement enfouis dans la mémoire. Une porte normalement fermée entre générations fut entre ouverte. Souvenirs de ce Friedrich Dürrenmatt, ami –peintre autant que littérateur- de sa maman elle-même peintre.
Moment fort de sincérité, d’exception. Applaudissements de la salle. Jamais je n’ai entendu si bien énoncé le …processus de création artistique. Reste-il un enregistrement ? Les 10 mn de son intervention furent magistrales.
Problème : après de telles confidences, il était impensable de prendre la parole...C’est donc sur le blog que je termine de ce que voulais dire ce soir là !
J'ai noté que la cérémonie fut classiquement littéraire. Or, n’oublions pas qu’il s’agit d’écriture…sur site web ! La Muse qui met ses locaux à disposition à l'un de ses membres est un espace "net up"dédié aux nouvelles technologies/ nouvelles entreprises. Tout de même.
REFERENCE LITTERAIRE PAPIER PAS MORTE !
Là n’est pas le moindre des paradoxes. Et fort intéressant comme enseignement. Webstory.ch s'annonce comme générant une « écriture d’un genre nouveau » Or, les références culturelles de la soirée sont restées tout a fait classiquement... livresques.
Le papier reste un référent incontournable. a ce propos, les Japonais, ce peuple technologique sont en train d'inventer un futuriste ...papier numérique à énergie intégrée en remplacement des tablettes....
Lors du petit raout, les auteurs étaient d’ailleurs tous identifiés par un stylo offert. Un stylo à encre, qui tache éventuellement. Pas une souris à impulsion électrique. Hélèna Zanelli est volontaire. Elle investit en pionnière l’espace technologique numérique. Avec son site d’écriture en ligne, elle a fondé une maison... digitale d’accueil des écrivains.
C’est d'ailleurs ce qui m‘avait intéressé lors de notre première rencontre au Salon du Livre de Palexpo.
webstory.ch : histoire d'écrire
Rédigez en ligne votre roman de l'été
Nota. D'autres sites dont le grenoblois Short Edition, tentent l’aventure de l’édition en ligne.Webstory est formaté pour accueillir des écrits de dizaines de pages. Short Edition a décidé lui de rester dans le court propre à la lecture web. Deux approches différentes du travail "d'auteur littéraire numérique" Court mais bon, Short Edition
La question fondamentale reste la suivante: est-ce que le fait d’écrire sur site web a modifié chez l’auteur son type d’écriture ??? Existe-il une web-écriture littéraire ?
Les auteurs que j'ai pu interrroger à la Muse ce soir là, n’allaient pas dans ce sens. Selon « Carmen » le net lui a permis de faire revivre et partager des écrits papier cachés dans un tiroir et connus de ses proches seulement. Alors dans ce cas Webstory aura servi….d’éditeur ! Ce qui est énorme de toutes façons.
Carmen me disait aussi participer à un atelier d’écriture à Carouge où elle lit ses textes devant public réel. Sur le site web, elle trouve un autre type de groupe de contact. Les deux démarches lui sont totalement complémentaires pour un écrivain néophyte ou non.
Alors si l’écriture littéraire sur web ne modifie pas intrinsèquement l’acte d’écriture artistique…qu’apporte internet ? Ceci dit, cette affirmation de "non transformation du mode d'écrire"sera à vérifier avec le temps….. Concernant l’écriture journalistique sur web, on s’oriente déjà vers de nouveaux codes de rédaction avec surtout l'uage des liens hypertexte.
A y réfléchir, on peut affirmer que le web est un redoutable instrument. Un "scanner du réel en quantité et en temps immédiat". Avec des instruments hyper puissants tels Google Analytics
Un éditeur classique, lui, va publier sur papier couverture carton un titre en 1000, voire 10 000 exemplaires. Ces livres vont ensuite se volatiliser dans la nature. Combien de fois l’acte de lire sera commis? Impossible de le savoir, de le définir.
Alors que la web littérature, comme tout domaine numérique, sera multi-scrutée en "Temps réel". Donc en permanence! Ce temps orwellien, fiction littéraire devenue réalité de notre quotidien voire de notre intime...Combien de personnes connectées à cette heure ci, combien de pages lues en direct, combien de pages... écrites en direct, combien de secondes sur une page, combien de clics et de "jaime"?
Redoutable instrument de mesure de nos petites vies...
La fondatrice de Webstory affirme que le site va prochainement être optimisé pour une meilleure ergonomie. Il devrait (éventuellement ? car il ne l’est pas actuellement... ) se faire référencer sur le grand portail littéraire du monde francophone : Babelio , 700 000 connexions par mois au minimum
L’univers web -même dédié à la littérature- est une donnée ultra contemporaine informative. Comme un instant brut de vie, tranché, scanné dans toutes ses mensurations qualitatives, économiques et quantitatives.
Sylvie Neidinger
(photos Neidinger)
Commentaires
Très intéressant, votre sujet!
Et suffisamment clair, si vous le permettez, pour ne pas avoir besoin de ce T majuscule à "temps" qui crée une légère confusion.
Certes, on y lit votre enthousiasme qui se conçoit.
Car cette approche est certainement promise à des développements futurs à suivre.
Merci en tout cas de ce compte-rendu qui mérite toute l'attention et le soin avec lequel vous l'avez partagé ici.
Merci, Madame pour vos encouragements. Je préfère garder mon T à Temps, comme un nouvel "espace temps" orwellien à mieux définir, à discutailler certes. Dans une future note ?
Excellente journée ! Sylvie Neidinger
L'ensemble de la démarche m'intéresse, T inclus!
Au plaisir d'en parler, j'en serais ravie.
Bien à vous
L'écriture en ligne est au tout début de son histoire et grâce à la créativité de chacun, de nouvelles possibilités se profilent. Un exemple parmi d'autres: Sur Webstory, deux webwriters s'amusent à écrire une page chacun à son tour pour créer une histoire à deux. Voir L'Engagement, de PongPing (clin d'oeil à se lancer la balle).
Le "stylo" offert aux webwriters est un stylet pour écran tactile: un bout sert à écrire de manière classique, et l'autre bout à toucher son écran. Ludique et subtil. L'important est de créer, d'écrire, quel que soit le support. Merci pour votre intérêt
Helena Zanelli, fondatrice de Webstory.