Syrie-On peut nommer syndrome "suez" cette propension d'un Etat à s'autoriser à intervenir dans un confit externe. Puis à se faire taper sur les doigts par "plus fort" que lui.
Dans l'affaire Suez réelle, deux anciennes puissances coloniales: la France et l'Angleterre, accompagnées d'Israel étaient intervenues unilatéralement autour du Canal de Suez. Pour ensuite s'en retirer immédiatement lorsque "Plus grand" c'est à dire USA et URSS l'avaient demandé.
Le même syndrome de Suez était lisible dans le projet d'attaque franco-américaine punitive programmée le 31 août 2013 dernier de la Syrie. Hors de tout mandat de l'ONU et en très grande solitude.
"Plus grand" est intervenu,comme dans l'épisode Suez initial.
Le respect du droit international a prévalu."Plus grand" a été cette fois l'ONU, la Russie+Chine+GB (son Parlement) l'opinion publique internationale largement défavorable aux attaques (énorme pression) + ... Barack Obama lui même donc les Etats-Unis.
LES USA EN SORTENT PARADOXALEMENT GRANDIS
Le Président US a eu l'intelligence pragmatique d'une immense volte-face, comprenant que les conditions du succès n'étaient pas réunies. Il a refusé d'ouvrir seul en Syrie une porte destructive dont il ne savait pas ce qui se trouvait derrière. Il a refusé une position de lonesone cowboy même avec la France, partenaire non cité, quantité négligeable pour l'Amérique. Il s'en sort "par le haut" Même si son intention profonde restait l'option martiale.
Obama a tout gagné sur cette gestion ponctuelle. Puisque qu'il est revenu dans la cour des décideurs écoutés, au lieu de faire entrer l'Amérique dans une problématique type Suez où une fois les bombes punitives lâchées par la première puissance militaire mondiale, des comptes politiques, juridiques, allaient être demandés par des supra- instances internationales, par l'opinion externe, interne, avec un service après vente probablement pénible à justifier. Surtout après le grave échec complet de la politique Us en Irak.
Les USA et la Russie se sont donc réunis à Genève pour discuter de l'élimination des armes chimiques syriennes aboutissant une résolution onusienne votée dans la foulée. Premier consensus depuis longtemps.
Certes la résolution non contraignante est favorable à la vision Russe et modère les éventuelles velléités impérialistes US.
L'erreur magistrale de départ des occidentaux dans l'affaire syrienne est d'avoir négligé à quel point ce pays est lié stratégiquement à la Russie (à la Chine, etc.) Dans l'euphorie des mal nommés Printemps Arabes, les occidentaux très sûrs d'eux, aveuglés par leur propre désir de prédation géo-stratégique ont prononcé un "dégage" aux dirigeants syriens alors que le pays vit dans la sphère russe. Pour mieux visualiser, c'est comme si Russes et Chinois avaient intimé aux dirigeants d'Israël de dégager alors que cet Etat est évidemment intrinsèquement lié aux USA.
Ce qui est inimaginable dans un cas l'était tout autant dans l'autre! Les Russes ont des bases maritimes dont Tartous, forment les militaires depuis des dizaines d'années. Ce "dégage", avec cette méthode là, était surréaliste. Il a duré 2 ans et demi. Les Russes n'ont jamais cédé.
Barack Obama vient d' entériner par sa volte-face la complexité du conflit.
Un certain impérialisme américain a certes perdu de son arrogance dans ce renoncement.
Mais un certain réalisme américain a prévalu, démontrant une Amérique qui reprend sa place négociatrice en chef, capable de s'ouvrir à d'autres arguments que ses désirs belliqueux.
Le Président Obama a bien joué d'autant que les informations d'aujourd'hui 1er octobre sur la paralysie des financements fédéraux bloqués par les républicains auraient gravement entaché la gestion du dossier syrien. En effet comment un Etat qui peine à financer la protection sociale de ses propres habitants, qui prend le risque de bloquer son propre système fédéral se mèle-t-il à l'international de dégager par les bombardements hors du droit international un régime politique tiers?
LA FRANCE EN SORT AFFAIBLIE, TOUJOURS ENGLUEEE DANS SON SYNDROME SUEZ
La France continue à se croire si importante.
L.Fabius voulait une résolution hyper contraignante sur la Syrie. Elle ne l'est pas.
F Hollande propose même à New-York de changer les règles du jeu international! Une modification des règles de fonctionnement du Conseil de Sécurité de l'ONU, pas moinns ! Avec des moments où "on" ( qui?) pourrait agir en se passant du veto sur la seule idée d'un belligérant. Raisonnement inaudible évidemment car le droit international est Droit. Si les exceptions démarrent, il n'y a plus....de Droit.
Chacun ferait alors selon son bon vouloir. "J'aime pas ce pays; tient, il m'intéresse, il a des ressources. Tient, j'y lâche ma petite bombinette"
Grâce à un média, une information a été essentielle pour la lecture des évènements récents : avoir accès aux élément historiques de la journée du 31 août donnés en toute inconscience par l'Elysée. Inconscience car au lieu de grandir l'action du président Hollande, l'amateurisme le plus total se lit entre les lignes.
Une exclusivité du Nouvel Observateur. Texte essentiel pour comprendre les faits que l'Histoire retiendra:
http://tempsreel.nouvelobs.com/guerre-en-syrie/20130927.OBS8824/exclusif-comment-hollande-avait-prevu-de-frapper-la-syrie.html
Je l'avais cité hier dans la précédente note. J'y reviens in extenso tellement c'est choquant.
"Les frappes sont pour ce soir." Le samedi 31 août, au matin, les plus hauts responsables français, civils et militaires, sont convaincus que le président de la République va déclencher le bombardement punitif de la Syrie la nuit suivante. Plus étonnant encore : François Hollande lui-même le croit aussi. Et cette incroyable méprise va durer jusqu'à la fin de l'après-midi. Entre-temps, pendant une dizaine d'heures, la machine de l'Etat aura été mise en branle pour effectuer ces frappes franco-américaines, les "vendre" à l'opinion et en gérer les conséquences diplomatiques.
Cette folle journée débute à 3 heures du matin, ce samedi 31 août, lorsque l'officier de permanence chargé des communications du président de la République reçoit un appel de son homologue américain. Ce dernier le prévient que Barack Obama va téléphoner à François Hollande sur la ligne directe et sécurisée qui relie l'Elysée à la Maison-Blanche. Quand ? Le jour même à 18h15, heure de Paris. Le malentendu transatlantique commence - un quiproquo risible s'il ne s'agissait de guerre.
Conseil de guerre
Décalage horaire oblige, le conseiller diplomatique de François Hollande, Paul Jean-Ortiz, découvre le message de la Maison-Blanche à 8 heures, dès qu'il arrive à son bureau, rue de l'Elysée. Il prévient illico François Hollande, qui décide de convoquer un conseil restreint juste après le coup de fil de Barack Obama. Devront être présents les ministres de la Défense, de l'Intérieur et des Affaires étrangères, ainsi que les "grands subordonnés" : le chef d'état-major, les patrons de la DGSE et du Renseignement militaire... Un conseil de guerre à l'issue duquel le chef de l'Etat va donner l'ordre formel du début des frappes françaises en Syrie. C'est du moins ce que croit François Hollande et, avec lui, toutes les personnalités convoquées.
Ce 31 août au matin, l'Elysée demande donc aux militaires de se tenir prêts à exécuter cet ordre supposé imminent.
Le plan était de bombarder pendant une nuit, en commençant vers 3 heures du matin au moment où les gens sont profondément endormis, dit un haut responsable français. Il s'agissait de détruire notamment des batteries de missiles et des centres de commandement de la quatrième armée, la chimique."
Les frappes doivent être réalisées par plusieurs Rafale volant en Méditerranée, au-dessus des eaux internationales. "Nous ne voulions pas tirer à partir du ciel turc, raconte un autre. Nous redoutions qu'Assad n'invoque la légitime défense et ne bombarde son voisin, ce qui risquait d'impliquer l'Otan."
Il y a un hic : les missiles de croisière Scalp prévus pour l'opération ayant une portée maximale de 250 kilomètres, les bombardements français ne pourront atteindre que des points situés dans l'ouest de la Syrie, Damas compris. Les Américains se chargeront de tout le reste. "Mais nous ne dépendions pas d'eux pour nos tirs et notre ravitaillement en vol, tient-on à préciser à la Défense. Il y a une seule chose que nous ne maîtrisions pas : le calendrier. C'est Obama qui devait donner le top départ."
Des preuves "déclassifiées"
Pour prouver à l'opinion que François Hollande n'agit pas à la remorque des Etats-Unis, façon Tony Blair pendant la guerre en Irak, l'Elysée décide aussi, ce samedi 31 août, de "déclassifier" certaines preuves françaises de l'attaque chimique. "Nous avons appelé ce document 'Synthèse nationale de renseignement déclassifié' et nous avons mis un drapeau bleu, blanc, rouge sur chaque page", raconte un officiel. Et, en prévision des frappes du soir, le ministère de la Défense fait fuiter ce texte dans le "Journal du Dimanche" à paraître le lendemain.
L'ensemble du plan de communication de l'opération est établi au cours d'une réunion à 14h30 ce même samedi dans le bureau de Paul Jean-Ortiz, avec les directeurs de cabinet des principaux ministères concernés. "Nous avons discuté des images à fournir aux journaux télévisés, celles de la montée en puissance de l'opération qui étaient déjà prêtes, et celles des premières frappes que pourrions livrer très rapidement", explique un officiel. "Nous avons aussi débattu du moment où il faudrait informer certaines personnalités étrangères, raconte l'un des participants. Il a semblé évident que François Hollande préviendrait lui-même Angela Merkel, juste après le coup de fil d'Obama."
"Le jour J était arrivé"
D'où vient cette certitude que le président américain va donner le top départ ce samedi ? "Tout nous conduisait à penser que le jour J était arrivé", dit un responsable français. Cela faisait une semaine que la perspective d'une action militaire franco-américaine contre la Syrie apparaissait inéluctable.
Tout a commencé le dimanche précédent, c'est-à-dire quatre jours après l'attaque chimique contre les populations civiles, quand Barack Obama et François Hollande ont discuté de plusieurs types de "punitions", y compris militaires. "Dès le lendemain, les états-majors des deux pays ont commencé à travailler à un plan de frappe commun", dit-on au ministère de la Défense.
Certes, les jours suivants auraient pu tout faire dérailler. Le mercredi, à Londres, la Chambre des Communes a voté contre une participation britannique à ces frappes. Et, on le sait moins, le jeudi, les Français et leurs alliés ont raté leur "blitz" diplomatique visant à conférer, si ce n'est une légalité, du moins une certaine légitimité internationale à une action militaire contre la Syrie. Ils espéraient recueillir une majorité des voix au Conseil de Sécurité, et ainsi contraindre Pékin et Moscou à opposer leur veto. Malgré les efforts de Laurent Fabius, Paris, Londres et Washington ne sont pas parvenus, selon nos informations, à rallier un nombre suffisant (six) de suffrages des pays membres non permanents du dit Conseil. Si bien que l'idée de passer par l'ONU a été abandonnée.
Pourtant, en fin de semaine, les Américains sont toujours aussi déterminés. Le jeudi, la conseillère de Barack Obama pour la sécurité, Susan Rice, fait savoir à Paul Jean-Ortiz que, malgré la défection britannique et le revers onusien, son patron est "tout près d'y aller". Et le lendemain, le vendredi 30, plusieurs indicateurs en provenance de Washington font penser aux Français que des frappes américaines sont imminentes. "Ce jour-là, John Kerry s'est entretenu plusieurs fois avec Laurent Fabius, assure un officiel. Il lui a dit que Barack Obama lui avait demandé de 'préparer l'opinion publique à des frappes.'" Au cours de cette même journée, dit un autre, "la Maison-Blanche a publié ses preuves sur le massacre chimique".
Et toujours ce vendredi, François Hollande et Barack Obama ont de nouveau discuté longuement. Le président américain dit qu'il n'a pas encore pris sa décision définitive mais que celle-ci ne saurait tarder. Il ajoute que les frappes pourraient avoir lieu bientôt, "avant ou après le G20", précise-t-il. "Rappelons-nous demain ou après-demain", conclut-il.
Le revirement d'Obama
Si bien qu'à l'annonce d'un nouveau coup de fil de la Maison-Blanche les conseillers de François Hollande sont persuadés ce samedi 31 août que le président américain a tranché dans la nuit et qu'il déclenchera l'opération le soir même ou au plus tard dans la nuit du dimanche (hypothèse peu probable puisqu'il part en Europe le lendemain). Personne à l'Elysée n'imagine qu'après avoir reçu une lettre de 186 parlementaires lui demandant de faire voter le Congrès Barack Obama a décidé in extremis de leur donner raison et encore moins que les principaux responsables de la Chambre des Représentants et du Sénat sont déjà au courant - plusieurs heures donc avant François Hollande...
"J'ai décidé d'y aller, dit le chef de la Maison-Blanche à son homologue français ce samedi à 18h15, mais je vais d'abord demander l'aval du Congrès." François Hollande est abasourdi. Il essaie de convaincre le président américain de revenir sur sa décision - en vain. Le chef de l'Etat rejoint alors les hommes qu'il a convoqués dans le salon vert pour un conseil restreint. Il ordonne aux militaires de rappeler les Rafale et évoque les prochaines fenêtres de tirs. De l'avis général, il n'en reste plus qu'une : aux alentours du 15 septembre, entre le vote des parlementaires américains et l'ouverture de l'Assemblée générale des Nations unies. "Après ce sera très difficile, voire impossible", convient-on. Cette ultime fenêtre sera refermée la semaine suivante par une manoeuvre diplomatique astucieuse de Vladimir Poutine.
Analyse de texte, noter la tonalité incertaine du vocabulaire employé: François Hollande "croit" "les hauts responsables sont "convaincus", la "méprise" va durer toute la"folle" journée;"malentendu transatlantique "quiproquo risible s'il ne s'agissait d'une guerre";"nous ne maitrisions pas le calendrier, Obama devait donner le top départ"
Amateurisme absolu: les français ont cru que le coup de fil attendu de Obama dans l'après-midi signifiait le top départ. Mettant en branle la folle journée française qui lance le timing. L'article dit "quiproquo risible s'il ne s'agissait d'une guerre".Obama a annoncé au public américain son... non engagement dans l'après midi.
AMATEURISME HALLUCINANT DE HOLLANDE ET SES EQUIPES, PIEGEES PAR LEUR ENVIE D'EN DECOUDRE !
Sommum du texte : "pour prouver à l'opinion que François Hollande n'est pas à la remorque des Etats-Unis version Tony Blair nous avons mis un drapeau bleu blanc rouge sur les pages du communiqué qui allait fuiter à la presse".....!!!!!!!!!!!!!!!
Plus incompétent, tu meurs!
Suite "tout nous conduisait à penser que le jour J était arrivé"; " la perspective d'une action militaire franco-américaine apparaissait inéluctable"
Toujours le vocabulaire du putatif : "personne à l'Elysée n'imagine"; "les conseillers sont persuadés" "
On apprend dans ce texte que les principaux responsables de la chambre des représentants furent informés plusieurs heures avant Hollande ! On apprend que Barack Obama avait pourtant demandé aux français de préparer leur opinion publique.
Fin. On lit que François Hollande, abasourdi, rappelle ses rafales. Sans commentaire. Le texte se suffit à lui-même.
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Si on peut résumer l'épisode géostratégiques du 31 août en d'autres termes :
François Hollande a péché par immense orgueil. Depuis que les anglais ont dit non, il s'est retrouvé en couple durant une semaine avec l'Amérique - vanté comme le couple franco-américain par les médias hexagonaux tout aussi orgueilleux-
N'en croyant pas ses yeux, il a voulu épouser sa promise de rêve.
Mais la belle Américaine, plus puissante, plus riche plus jeune, plus jolie a trompé tous ses espoirs en se retirant brutalement du lit de noces au dernier moment. Par un magistral volte-face.
Conclusion. Se mettre en ménage avec plus grand que soi quitte à y perdre son âme était un pari risqué. Ici l'âme évaporée étant la souveraineté de la France, son indépendance, les dizaines d'années de diplomatie sérieuse.
Le pari personnel du Président de la République est complètement perdu. Très inquiétant en tous cas pour l'image donnée de la France devenue à la fois ultra va-t-en-guerriste et basiquement suiviste. C'est contradictoire.
Cette contradiction est induite dans ce que j'ai nommé le "Syndrome de Suez".
Sylvie Neidinger
Ce blog a ouvert une nouvelle rubrique politique à l'occasion de ces évènements intitulée Grenouillade...: quand la France surjoue.