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  • Michel Aflak est mort trois fois !

     Le chantre du nationalisme arabe est décédé à trois reprises ! Une première fois le 23 juin 1989 à michel aflak,nationalisme arabe,baas,usa,printemps arabeParis de sa belle mort, à l’hôpital militaire du Val de Grâce.

    La seconde a lieu en  2003 à Badgad  par les troupes américaines qui viennent d’envahir l’Irak. Sa sépulture est volontairement profanée sur ordre du gouverneur  Paul Bremer- voire de ses supérieurs ? Le mausolée rasé, la statue endommagée, les archives  détruites.

     La troisième fois, en cours… avec ce « Printemps arabe » qui prend le contre- pied idéologique du nationalisme arabe théorisée par l'intellectuel, homme politique, Michel Aflak et ses compagnons.

    L’affaire de  la tombe vandalisée, de la dépouille détruite et probablement disparue  avait scandalisé  le monde arabe  à l’époque. Uniquement lui.

    Quel besoin avait l’armée la plus puissante au monde  de s’attaquer à de pauvres ossements, dans un acte rare d’irrespect ? Quel "symbole à abattre" représentaient ces reliquats d'homme?

    Finalement, cet acte daté de 2003  s’éclaire dans le contexte géopolitique actuel. Voire, il offre une clef majeure de compréhension des événements apparemment confus qui agitent  la région, dans la droite ligne de la doctrine Bush de reconfiguration du moyen-orient.

     Qui est-il? Michel Aflak est tout simplement le théoricien  du  Baas,   le parti de la résurrection arabe (lire  article documenté de Philippe Conrad, directeur de séminaire au Collège Interarmées de Défense)

    La Syrie généralement considérée comme « cœur » du monde arabe  est très certainement au cœur historique du nationalisme du même nom.

    Michel Aflak nait en 1910 dans la communauté orthodoxe damascène,  d’un père déjà nationaliste, opposé à l’empire ottoman puis aux français au sein du Bloc National fondé en 1928.

    Ce mouvement de rébellion active fait suite aux idées avant-gardistes de la « Nahda » produites au XIXème siècle au sein de la diaspora égyptienne par des intellectuels libano-syriens, souvent maronites.

    La  « Nahda= renaissance »  intervient au départ  comme prise de conscience "face à" et "grâce à" l'Europe, de la nécessaire modernisation des sociétés arabes: écoles,  séparation de l'État et de la religion,  libération féminine, égalité de traitement confessionnel etc.

    michel aflak,non alignés,usa,israel,egypte,baas,nationalisme arabe,printemps arabeEn 1942, Michel Aflak, intellectuel chrétien,  jettera les bases d’un parti nationaliste panarabe dit de la « résurgence », le Baas. Ce, avec son ami  Salah Bitar, sunnite d'une famille  pieuse de Midan (quartier de Damas) rencontré à la Sorbonne, puis plus tard avec Zaki al Arzouzi, un alaouite d'Alexandrette né à Lattaquié, initiateur du "Club de l’arabisme".Tous ces politiciens, écrivains, philosophes, professeurs  ayant Paris en commun.michel aflak,non alignés,usa,israel,egypte,baas,nationalisme arabe,printemps arabe

    Au congrès fondateur du Baas en 1947, son discours : « une seule nation arabe, de l'Atlantique au Golfe. Les Arabes forment une seule nation ayant le droit imprescriptible de vivre dans un État libre. Les moyens de la résurrection sont les suivants : l'unité, la liberté, le socialisme"

    Il va sans dire que cette théorie politique se pose contre la création de l'Etat d'Israël (1948) et de ses développements. Tous ces idéologues participeront activement à des combats. Pour finir, le parti Baas se déclinera dans les Etats voisins de l'Irak et d'Egypte. Une éphémère RAU ," république arabe unie" unissant Egypte et Syrie verra le jour en 1958. Elle sera vouée à l'échec.

    Michel Aflak doit s'exiler en 1966 de son pays suite au coup d'Etat par des officiers marxistes dont le général  Salah Jedid. Il critiquera cette prise de contrôle des militaires. S. Jedid orientera clairement le pays dans l'axe soviétique. ll sera débarqué en 1970 par son ministre de la défense Afez el Assad.

    BASES DE SA THEORIE POLITIQUE NATIONALISTE ARABE:

    Aflak rejette le capitalisme tout comme le marxisme (car athée et  matérialiste) Il entend  construire un socialisme ... arabe:« Il n'est pas difficile pour les Arabes, s'ils se libèrent du cauchemar du communisme, de découvrir un socialisme arabe émanant de leur âme, au service du nationalisme arabe et comme facteur essentiel de sa résurrection" (1944 Aflak et Bitar)

    Ses bases de réflexion se nomment arabité, nationalisme, socialisme ( surtout pas communisme ni marxisme !)  laïcité (certes "orientale") et islam non politique.

     /Arabité exacerbée comme recherche du "plus grand dénominateur commun "dans le cadre des sociétés pluri-confessionnelles proche-orientales.

     Toutefois, ce concept d'arabité si cher au nationaliste  damascène est un des plus  difficiles à définir puis à  manipuler car toutes les minorités ou confessions du proche-orient ne sont pas forcément  arabes. Et, par ailleurs,  tous les  "vrais" arabes ne se définissent pas  obligatoirement comme tels- au Liban par exemple !!

    De plus, arabe ne signifie pas forcément  "enfant du désert, du sable et de la tente" ! Car l'urbanité arabe est parfaitement identifiable (ex :Damas et ses maisons dites " arabes" qui tournent autour d'une cour, d'un bassin  et d'un jardin de roses, abritant une famille élargie)   

    La définition la plus simple : arabe =" sémite et locuteur de langue arabe". Point barre !

     /Nationalisme. Les Etats Nations arabes, souverains et puissants  se créent dans le sillon des Indépendances  alors que des enjeux géo-stratégiques (autour d'Israël, autour de Suez, passage si vital pour le commerce mondial) et des ressources pétrolières, gazières sont majeurs pour les super-puissances. Cela  va, quelque part, gêner les occidentaux.

    En outre ces Etats nationalistes restent un front du refus à toute initiative d'avaliser les frontières israéliennes de 1967. Ils réclament invariablement l'application du droit international (la fameuse résolution 242 de l'ONU) et invariablement le concept de "Paix contre territoires occupés en  1967".

    /Socialisme. La Syrie se nomme officiellement "République  Arabe Syrienne" et le parti Baas dénommé "arabe socialiste ". L'Union Soviétique puis la Russie reste  sa  sphère  relationnelle privilégiée  en matière militaire notamment (formation des cadres, armement, accueil de navires à Tartous) suite au coup d'Etat de 1966 par un militaire baasiste opposé aux fondateurs (Aflak et Bitar) qu'il chasse, Salah Jedid, pro-soviétique.

    Laïcité... toute orientale et originale : une superstructure laïque... basée sur des fondements confessionnels !

    Oui, la Syrie est laïque mais d'une manière particulière,  tout comme l'était la pensée de Michel Aflak!  

    Le "Pays de Sham",  Bilad el Sham possède une superstructure laïque: sa Constitution ne fait pas référence aux lois religieuses du type charia, la mention de la confession a disparu des cartes d'identité sous Hafez el Assad. Des lois - pas forcément appliquées-interdisent le voile dans les écoles et les Universités.

    Mais cette" laïcité non athée" (complexe ) chapeaute un système confessionnel traditionnel : dans ce pays, on ne peut que se voir inscrit à la naissance  sur les listes d'une communauté (toujours celle du père). Chaque communauté /confession gère ses ouailles suivant les règles qui lui sont propres. Ce qui rend l'Orient compliqué à celui qui ne sait le décoder et le pratiquer. Résumé: une loi laïque non athée globale s'applique en même temps que des lois confessionnelles et/ou communautaires aussi diverses les unes que les autres.

     L'Islam n'est absolument pas négligé dans la pensée de Michel Aflak. Il considère que cette religion est une composante majeure de l'identité arabe.  D'ailleurs, la règle de la Constitution impose en Syrie, république... laïque un Président musulman. Sauf que  la laïcité  prônée par le Baas  évacue la notion d'islam politique.

    Conclusion : Les grands  Etats arabes  qui se structurent lors des  indépendances post coloniales et/ou post monarchiques  vont puiser à l''eau  des théories nationalistes affinées (particulières au contexte local) de Michel Aflak. Et de fait, se retrouver le plus souvent  dans le camp des  non alignés, proches de la sphère soviétique. Toujours  très soucieux de leurs  limites territoriales et des prérogatives souveraines.

    On comprend mieux pourquoi l'armée Us  détruit le mausolée Aflak et la dépouille dès ses premiers mois de présence en Irak. Ces grands Etats arabes indépendants, nationalistes de type laïc ont l'heur de se trouver, on le répète, dans " l'autre camp".

    Les syriens se reconnaissent dans une syrianité  historique (anté-biblique et biblique, califat  omeyyade des années 750 ) Egalement dans une syrianité nationale sinon nationaliste qui transcende l'extraordinaire mosaïque humaine de sa vingtaine de confessions/communautés.

    Aujourd'hui, avec le "Printemps arabe", une guerre civile fait rage pour remplacer apparemment un Etat nationaliste laïc mais non athée par un islamisme politique  pro-occidental: la troisième mort de Michel Aflak?

     Sylvie Neidinger

     

    Série Surya sur blog TDG "neidinger" :

    Article 1-Baal Hadad lance ses foudres en Syrie.

    Article 2-Le printemps néo-colonial arabe

    Article 3- Clinton-Israël en "intelligence amie". Les Etats Arabes le sont-ils?

    Article 4- Michel Aflak est mort trois fois

    -Un article spécifique sera consacré à la description  de l'extraordinaire mosaïque de la  population syrienne, si riche et si complexe.

     Abstract/résumé de "Michel Aflak est mort trois fois!"

    "La tombe de Michel Aflak est vandalisée en Irak en 2003 par l'armée US. Cet intellectuel syrien était le théoricien du parti Baas: arabité,nationalisme, laïcité (originale laicité non athée syrienne comme superstructure d'une société clairement confessionnelle) Le Printemps arabe tend vers  l'objectif   de supprimer les régimes nationalistes arabes issus des indépendances, en concordance avec la doctrine Bush de reconfiguration dudit monde arabe au profit  d'un Islam politique pro-occidental( prochain article).

    Trois  photos= capture d'écran sur le net. Michel Aflak, Salah Bitar, Zaki Arzouzi

     

  • Clinton-Israël en "intelligence amie". Les Etats Arabes le sont-ils?

    « Intelligente avec ses amis israéliens » avec comme objectif stratégique désigné l'axe chiite : les récentes déclarations de la secrétaire d'Etat américaine  Hilary Clinton donnent un décodage  significatif autour du « Printemps arabe »

    Lors de sa visite à ses alliés hébreux le 16 juillet dernier, elle répond à  Benjamin Netanyahu (qui évoque  la  période actuelle pleine  de changements sans précédents  et beaucoup de défis à relever)  que les Etats-Unis entendent : « continuer à se concerter étroitement avec Israël comme nous le faisons sur une base quasi quotidienne au niveau de nos deux  gouvernements »

    Face au Président Shimon  Peres, elle  développe  un commentaire hyper significatif : "C'est une période d'incertitude, mais aussi un moment où se présentent des occasions. Nous avons la possibilité de faire avancer nos objectifs communs en matière de sécurité, de stabilité, de paix et de démocratie. C'est dans ces moments-là que des amis comme nous doivent penser ensemble, agir ensemble.  Nous sommes appelés à être intelligents, créatifs et courageux. »

    USA et Israël en intelligence ensemble, amis intelligents face aux ...autres. Ce,  alors que la responsable américaine arrive  d'une visite en Egypte à la rencontre du nouveau  Président  islamiste Morsi.

    Quid des Etats arabes par déduction logique ? Non intelligents ? ? Ils  n'ont pas eu, en tous cas, l'honneur  de cette proximité spirituelle et amicale. Remarque ...aucun n'a protesté !

    Ensuite, en visitant  ses alliés turcs le 11 août dernier, la secrétaire d'Etat américaine a réaffirmé  l'objectif prioritaire  US de  « casser les liens Hezbollah, Syrie, Iran »

    Iran et Syrie étaient déjà dans la liste des Etats dits « voyous » par la doctrine Bush énoncée le 20 septembre 2002, listing dit    de «  l' axe du mal » suivant la terminologie moralisante de l'époque.

    Le premier Etat militaire au monde n'entendait  plus voir sa suprématie contestée comme elle le fut pendant la guerre froide. Surtout après les  évènements du 11 septembre.

    En lieu et place aujourd'hui  est annoncée comme objectif martial une liste de pays  exclusivement ...chiites moins l'Irak-passé entre temps sous domination américaine- et moins la Corée du Nord, hors actualité.

    En quoi le chiisme, cet islam à clergé, dérange -t-il  au point d'une telle focalisation...mondiale ?

    Les réalités présentées par Madame Clinton ne sont pas toutes de même nature -car l'Iran est perse, non arabe. Mais les trois  désignés se soutiennent effectivement sur le terrain:

    -          Le Hezbollah est l'un des partis politiques au pouvoir au Liban, celui des chiites  qui, dans le jeu confessionnel institutionnel dirige le Parlement (présidé par Nabih Berri du parti islamique chiite Amal) Analyse : s'attaquer au Hezbollah, composante du paysage politique, c'est aussi s'attaquer à l'Etat souverain du pays du Cèdre !

    -          La Syrie est baassiste, socialiste et LAIQUE dans sa constitution. Son président de confession  alaouite (une version chiia  très particulière, ésotérique)  appartient à une composante minoritaire du pays mais au pouvoir.

    -          Le chiisme islamique iranien  est religion d'Etat. L'Iran possède ou veut posséder l'arme nucléaire. Les occidentaux lui envoient  pour contrôle, l'agence onusienne AIEA. Les iraniens ne comprennent pas pourquoi Israël, sur-équipé en arsenal nucléaire, ne rend de comptes à personne. La  dite communauté internationale- dont les européens habituellement exigeants- ne lui demandant  aucune comptabilisation ni surveillance de l'AIEA ! Signe que tous les pays ne vivent pas une égalité de traitement sur le terrain même onusien, selon les observateurs.

    Ce qui unit ces trois  chiismes désignés "Ennemi mondial numéro 1"? Très  certainement le fait qu'ils sont non alignés  et qu'ils ont la dent dure contre Israël en plus évidemment de positions géostratégiques majeures !

    Ils réclament toujours haut et fort le principe de la « paix israélo-palestinienne  contre les territoires de 1967 » alors que l'Etat hébreu, les USA amis, les alliés européens et autres   prônent plus ou moins ouvertement  une paix armée gratuite, en échange de ...rien du tout !

    Les chiites de facto restent la composante du « grand moyen-orient » non alignée à l'Occident  toujours pro-russe  et/ou pro-chinoise.

    Depuis plusieurs années, Israël menace d'attaquer l'Iran par la voie aérienne. Et semble toujours prêt à le faire.

    En revanche, son activisme contre les chiites n'a pas toujours été gagnant. Son intervention directe  du 12 juillet 2006 contre le Hezbollah fut un échec. Trop sûre d'elle, l'armée israélienne  attaque à froid  le Liban pour  démanteler la milice. L'opération vire au vinaigre. Elle s'y casse les dents. La communauté internationale désapprouve massivement l'attaque du Liban au cœur de l'été. Par les doubles nationalités- détail oublié de l'état-major israélien !- tous les pays du monde presque  avaient des nationaux coincés au Liban et le faisaient remarquer haut et fort. Israël s'est retiré. La milice  chiite a ensuite  paradé de sa victoire, celle d' une milice contre une armée d'Etat.

    Avec le «  Printemps arabe »  l'objectif US de démolir l'axe  chiite s'applique directement à la Syrie. Les USA ont compris avec l'Irak combien une occupation directe leur  coûte en vies de soldats, en moyens financiers colossaux, en symbolique négative d'occupant. L'Etat hébreu a compris avec le Liban que les attaques au sol sur le terrain coûtent  cher en vie de soldats, en images médiatiques désastreuses.

    Usa et Israël sont  effectivement hyper intelligents en Syrie. Puisqu'aujourd'hui une partie des arabes sunnites  et chiites   s'y battent désormais... entre eux ! Ils  réalisent de fait  les objectifs américains du  GMEI (great middle east initiative)

    Le « Printemps arabe »  dans sa version syrienne est absolument productif pour les deux protagonistes  amis qui bénéficent d'une une guerre par procuration sur le terrain ( certes avec des appuis logistiques indispensables. Tout comme en Libye , ceux de Misrata ne pouvaient rien  bouger  ni réussir sans l'Otan)

    Dans "balad el sham" la "révolution" médiatiquement dénommée,  avait commencé chaque vendredi après-midi au sortir des mosquées de quartiers traditionalistes sunnites du type Baba Amro à Homs etc.

    Lors des  manifestations par ceux que nos médias occidentaux nommaient les « démocrates » le spectateur télévisuel  pouvait lire les slogans confessionels mortifères  du type «  alaouites au cimetière, chrétiens au Liban »  Au programme : guerre civile et déplacements de populations. Pas moins. Ce dès le printemps 2011, dès le début. Avec l'appui des...grandes démocraties mondiales: USA, France, GB etc...

    Les occidentaux sur le terrain syrien ont enclenché, démultiplié les faits par un accompagnement certain des  services secrets français au Liban,  de la Cia en Turquie etc. Le tout financé par l'Arabie Saoudite et le Qatar un conflit interne.

    Résultat : aujourd'hui des arabes sunnites se  battent en Syrie contre des arabes chiites mais aussi de facto  contre   les autres confessions... pour répondre aux objectifs atlantistes !!!

    En résumé : en Syrie,  les arabes se battent entre eux, dont les sunnites pour éliminer l'axe chiite au profit de l'axe de l'Otan, avec la bénédiction de l'actuelle Ligue Arabe.

    Oui, vraiment américains et israéliens sont effectivement... redoutablement  intelligents ! Mais au risque de jouer avec le feu qui allumera un  embrasement général incontrôlé.

    La suite se joue ces jours -ci sous nos yeux  au....  Liban (patrie du Hezbollah ) qui commence à se voir destabilisé par les évènements du grand voisin, le pays de Sham, dénomination  antique de la Syrie. L'Irak à majorité chiite qui connait chaque jour son lot d'attentats peut aussi s'enflammer.

    Sylvie Neidinger

    Série Surya sur blog TDG "neidinger" :

    Article 1-Baal Hadad lance ses foudres en Syrie.

    Article 2-Le printemps néo-colonial arabe

    Article 3- Clinton-Israël en "intelligence amie". Les Etats Arabes le sont-ils?

    Article 4 à venir - Michel Aflak est mort trois fois


    Résumé-Abstract de Clinton-Israël en "intelligence amie'Les Etats Arabes le sont-ils?:

    L'axe chiite Hezbollah-Iran-Syrie, non aligné, est dans le viseur des occidentaux . En Syrie, par le Printemps arabe, les USA, Israel et les alliés réalisent cet objectif par procuration : une guerre civile confessionnelle interposée entre musulmans sunnites et chiites.

    Photo issue de capture d'écran de Libération, en lien web avec cet article.

    Cet article a créé deux liens web avec des articles intéressants produits par l'Université de Sherbrooke( Québéc- Canada) Nota : ce site très intéressant baptisé "Ecole de politique appliquée"web

     

     

                                          RUBRIQUE PROCHE-ORIENT SERIE SURYA

     

     

     

     

  • Le printemps néo-colonial arabe

    Le processus de prise de possession coloniale du monde arabe n'était pas achevé avec les décolonisations !

    Il se poursuit sous nos yeux par le dit « printemps arabe »

    Ce « printemps »  finalement développe des conséquences qui partent dans un tout  autre sens que la modernisation démocratique annoncée.

    militaires français gouraud 001.jpg

    Deux observations :

    a- Hier le 10 août, les manifestants tunisiens de Sidi Bouzid, épicentre originel du mouvement d'indignation, s'enflammaient  à nouveau. Ils arguaient du fait que leurs revendications initiales de prospérité économique n'ont pas été satisfaites.

    En lieu et place du mieux être : un gouvernement islamiste s'est installé au pouvoir.

    b- Par extraordinaire, les pays directement à la manœuvre pour « accompagner » le changement arabe sont la France, la Turquie et l'Angleterre et leurs alliés. Soit les trois anciennes puissances coloniales de la zone !

    La Turquie ottomane (occupation de huit siècles du monde arabe et de la Syrie depuis le XVIème siècle) l'Empire britannique (Egypte, Jordanie, Palestine, Irak) l'empire colonial français ( Maroc, Algérie, Tunisie dès le XIXème siècle puis le Liban et la Syrie) Enfin les Usa pour la récente occupation de l'Irak.

    Une colonie, suivant la définition romaine est un groupe de peuplement organisé qui se détache d'un territoire avec lequel il reste en relation pour investir un nouveau territoire. Des liens se créent autour d'une domination économique et politique, avec application du principe de diviser pour régner. Donc morceler, communautariser.

    Historique de la colonisation occidentale en Syrie:

    1-Les croisades. Le premier mouvement d'Occident vers le Levant est celui des croisades, d'essence religieuse. Au nom de la religion chrétienne et directement contre la religion musulmane qui naît quelques siècles plus tôt au VIème siècle, son objectif officiel est  de    « sauver les lieux saints, protéger...la Croix » Mais aussi d' aller chercher  produits et technologies encore inconnus en Europe.  Le monde arabe de cette période historique était techniquement et scientifiquement plus en avance. La Côte syrienne  est balisée de châteaux forts croisés (Kalat al Hosn, le Crac des Chevaliers, vers Homs etc.)

    L'idéologie européenne valorise ces faits d'armes. Les familles nobles se prévalent d'ancêtres croisés. La réalité sur le terrain est vécue autrement. Byzance a vu de nombreuses églises saccagées au passage de ces troupes. Idem au Levant, les populations locales même chrétiennes ont déploré ces occupations.L'académicien franco-libanais Amin Maalouf a admirablement décrit dans son ouvrage "les croisades vues par les arabes", l'envers du décor nommé  «  barbarie en terre sainte sous couvert de religion »

    Ici, une perspective  inversée de l'histoire  rédigée par ceux ...qui la subissent.

    2-L'occupation ottomane du monde arabe jusqu'en Afrique du Nord et aux portes de l'Autriche  démarre au XIIIème siècle par un califat. Selim 1er occupe la Syrie dès 1516. Cette   longue occupation de territoires majoritairement musulmans s'explique évidemment  par le fait que les ottomans sont de religion musulmane.

    A bout de souffle au XIXème siècle, l'empire ottoman  que l'on nomme « le vieil homme malade » voit ses terres possédées reprises par l'Europe conquérante.

    Napoléon lance son « Expédition » en Egypte (1798-1801 Puis la France s'installe en Afrique du nord (débarquement en 1830 avec colonisation de peuplement , création de départements français en 1848) Ensuite  en  Syrie.

    3-Le mandat français sur la Syrie est  issu du Traité de Sèvres (1920)

    militaires français syrie 1 001.jpg

    Les colonisations françaises et anglaises sont d'essences différentes.

    Les anglais aux Indes par exemple,  relativement peu nombreux sur le terrain, organisent le «trading», le commerce mais ne cherchent pas spécialement  à « assimiler » les populations car « l'anglicité »  étant un état tellement hors-norme selon eux, que tous les autres ne peuvent le devenir. C'est de facto une colonisation pragmatique, plus consensuelle.

    La colonisation française, narcissique, civilisatrice, toute "brillante" de son roi-soleil et de son "siècle des lumières"   cherche à rendre les populations locales identiques à elle-même. Pas en terme d'égalité des  droits certes mais en modèle idéologique : le fameux « nos ancêtres les gaulois »  enseigné en Algérie comme effet de miroir.

    Or, en Syrie, contrairement à l'Afrique du nord pas encore mûre sur ce point à cette période, cette volonté coloniale française d'imposer un mode de civilisation, une occupation  au ...berceau de l'humanité ne passe pas. La révolte gronde...dès le départ. La  Syrie du Croissant fertile (des premiers agriculteurs, du premier alphabet au monde,en cunéiforme à  Ugari, des premières urbanisations etc.) n'accepte pas.

    Pour autant,  la  méthode française  de colonisation présente l'avantage d'une redoutable  efficace. En 20 ans, les français auront réalisé ce que huit  siècles d'occupation ottomane n'ont pas permis de faire. Les bases d'un Etat moderne ont été lancées (routes, écoles, cadastres, poste, tram)

    [En juin 2012, partout en Syrie,  à Damas, Alep, Homs, Hassaké, les élèves ont passé les diplômes dits du  « brevet » et du « baccalauréat » exactement comme en France.]

    L'occupation française reste toutefois insupportable à ce peuple orgueilleux et fier. L'insurrection part du Djebel Druze. Des partis nationalistes arabes se fédèrent. S'ajoute le fait que lors de la 2ème guerre mondiale, l'autorité de la France se délite localement  entre vichystes et gaullistes.

    Le 29 mai 1945, après 10 jours de manifestations, les français bombardent Damas allumant un gigantesque incendie toujours en  mémoire. En avril 1946, l'hexagone évacue totalement le pays.

    Syrie, oubliée de la mémoire collective française. Syrie à la découpe.gouraud druzes 1924 001.jpg

    Curieusement, la mémoire collective française a totalement occulté qu'elle administrait cette zone  tout autant que l'Afrique du nord. Peut-être parce que, d'une part elle en a été chassée et surtout parce que  les français  avaient d'autres ...occupations à...subir en  39-45 ?

    Les syriens n'ont rien oublié, eux ! Ces évènements font l'objet de fêtes nationales et de monuments mémoriels.

    Mais le pays n'en sort pas identique ni  indemne. L'antique  « Grande Syrie » s'est vue découpée lors du Traité de Sèvres (1920) puis du Traité de Lausanne (1923) qui vont établir des frontières au sein du très vieil Empire ottoman. Et la suite...

    Coloniser signifie diviser géographiquement, diviser les populations.

    Sous mandat de la Société des Nations (SDN, ancêtre de l'Onu) le pays se voit morcelé en six entités : Etat de Damas, Etat d'Alep, Djebel Druze, Grand Liban, Etat Alaouite, Sandjak d'Alexandrette.

    Nota: l'appelation géographique "Liban" existe depuis les textes antiques (= la montagne blanche comme le laitage  "laban") Elle  nommait le Mont Liban, ce pourvoyeur de bois de cèdre depuis les temps immémoriaux.

    Avec la complicité de la France, La Turquie moderne va largement se servir. Elle s'empare du sandjak d'Alexandrette, 19 ans  après avoir obtenu  sur la frontière nord de la Syrie Cilicie et Euphrate par les deux traités successifs. Des territoires de langue arabe passent à la Turquie.

    La France avait  Protectorat sur Iskanderun (Alexandrette) Elle se devait de le ....protéger. Or, elle donnera tout simplement  le sandjak à la Turquie en 1939 en échange d'une possible  neutralité autour de  la 2ème guerre mondiale. La grande ville commerçante d'Alep se voit ainsi privée de sa façade maritime. L'épisode reste toujours douloureux dans la mémoire syrienne.

    L'Etat moderne syrien se recomposera à partir des états mandatés  de Damas, Alep, Alaouite, Druze avec  une frontière très  amputée  au Nord, à l'Est  et sans  Iskanderun.

    4-Le Jolan syrien occupé. L'Etat moderne d'Israël se constitue en 1948 sur le pays nommé Palestine, avec l'accord des anglais (Balfour). Cet Etat s'empare du plateau syrien du Julan (Golan) en 1967 lors de la Guerre des Six jours. Cette zone est un véritable château d'eau qui  accède au  lac de Tibériade et la  haute vallée du Jourdain. L'occupation est déclarée illégale par les résolutions de l'ONU successives  du Conseil de sécurité... que personne  ne s'empresse d'appliquer.

    Du point de vue juridique international, l'occupation n'est pas validée à ce jour. Les statuts territoriaux sont en statu quo. La Syrie en réclame toujours la rétrocession.

    5-Dernier avatar directement colonial et anachronique : l'occupation américaine de l'Irak en 2003.

    Pour terminer avec les colonisations affectant la Syrie, cette fois indirectement par les réfugiés qu'elle accueille : le cas de l'Irak.

    Les  Usa y lancent en 2003 suite à la doctrine Bush une intervention de type coloniale avec occupation directe pourtant passée de mode.

    Curieusement, les américains adoptent la méthodologie colonialiste ultra- invasive " à la  française" en accompagnant la démarche d'un projet  civilisationnel avec l'arsenal  théorique du "choc des civilisations "par Samuel Huntington qui publie à Harvard  ses thèses en 1996.

    Les Etats-Unis  sont alors dans un sentiment de surpuissance. Les murs de Berlin sont tombés. Le cas de l'URSS est supposé réglé. La nouvelle Russie semble neutralisée. Un théoricien ira jusqu'à évoquer, décréter  la "fin de l'Histoire" !!!!!!!!!

    Les terminologies "d'hyperpuissance" ou "d'empire américain" commencent à se lire ici et là.

    L'Irak est occupé en direct, un gouverneur militaire, le Général Jay Garner nommé, l'armée locale  désintégrée.

    Toutes les erreurs à ne pas commettre sont commises !

    Pire, l'Histoire montrera que le casus belli avancé  pour entrer dans le conflit (la présence d'armes de destruction massives) s'avère  inexact.

    Idem : la résolution de l'ONU permettant la guerre est jugée non-conforme par les juristes du droit international.

    Tony Blair porte sa large responsabilité dans le choix US d'occuper. Strictement seul, le Président Bush Jr hésitait à entrer dans cette logique martiale,  vis-à-vis de son opinion publique. Le travailliste britannique a donné l'impulsion.

    Jacques Chirac, du parti gaulliste de la décolonisation,  par la voix de son porte-parole Villepin, tenta d' empêcher le cours des choses. Les  applaudissements ont rejailli dans l'enceinte new-yorkaise de l'Onu à l'évocation d'un monde multipolaire et du  caractère dépassé des occupations.

    Mais les Usa- première puissance militaire mondiale,  forte de ses certitudes - sont  entrés dans un processus de colonisation direct d'un pays musulman. La tentation géostratégique était trop forte. Si l'on divise la population irakienne par les réserves  du sous-sol, elle est l'une des plus riches au monde !

    Les caractéristiques de la colonisation ont bien été appliquées avec la partition du pays . Les  zones pétrolières rebaptisées "égion autonome du Kurdistan" sont détachées et les séparations ethno-confessionnelles installées (les kurdes y étaient présents mais pas eux uniquement, comme pour toute cette région multi-confessionnelle !)

    L'Irak version atlantiste est entré dans une anarchie, un problème communautaire majeur. La semaine dernière, soit 9 ans après, une série d'attentats causaient encore la mort d'une centaine de personnes. Le pays est sectorisé, destabilisé pour longtemps. Qui aujourd'hui entend la voix de ce pays à l'international? Attentats récurrents.

    Les murs de séparation y poussent comme tentative désespérée et absurde de régler l'inter-confessionnalisme.

    L'image de cette armée d'occupation américaine est  désastreuse pour les Usa eux-mêmes. Autour de 2 millions d'irakiens ont quitté leur pays pour se réfugier dans les pays voisins. Dont 1,8 million pour la seule Syrie.

    Ce déplacement de population irakienne  est le plus important ayant affecté le proche-orient depuis les millions de réfugié palestiniens de 1948. Dans le plus grand silence médiatique !? Effectivement  il est peu glorieux de dire haut et fort que le camp occidental vient de créer un tel mouvement de réfugiés ( deux  millions !) suite à un conflit supposé initié sous  mandat-bancal certes - de l'Onu !

    6- Plus de 2 millions de réfugiés en Syrie issus de ses  voisins  dans le silence médiatique occidental

    On a vu  comment la Syrie  perd des territoires mais se voit augmentée de 2  millions de personnes au final  issues de populations expulsées des pays voisins.

    Arméniens et assyro-chaldéens s'installent suite aux massacres de 1915 dans les régions du nord (Alep) et à l'est (Assaké) L'Unwra gère 500 000 palestiniens dans 12 camps ( 9 officiels, 3 informels) suite aux expulsions d'Israël,  auxquels s'ajoutent suite à la prise de possession de l'Irak par les Etats-Unis 1,5 à 1,8 millions d'Irakiens suivant les estimations. Plus les tcherkess, kurdes etc...

    Soit une population syrienne augmentée de 1/10ème suite aux guerres des autres ! Ce, pour un pays qui n'est pas connu pour son extrême développement économique. L'Unrwa, organisme onusien vient en aide aux Camps palestiniens. Les aides arrivent -elles pour les  réfugiés irakiens?

    Pragmatiques, les américains ont rapidement analysé les erreurs de la colonisation directe en Irak, où ils sont encore aujourd'hui. Mais leur projet de redessiner le proche -orient, avec les alliés tient toujours. L'axe  chiite est décrété « bête noire » à éliminer.

    Le printemps arabe vient opportunément permettre la poursuite de cet objectif, sous une autre forme plus subtile... néo-coloniale.  C'est ce que nous analyserons dans un prochain article intitulé : « Théocraties religieuses à l'assaut des théocraties laïques »

     

    Sylvie Neidinger

     

    Série Surya sur blog TDG  "neidinger" :

    Article 1-Baal Hadad lance ses foudres en Syrie.

    Article 2-Le Printemps néo-colonial arabe

    Article 3- Clinton-Israël en" intelligence amie". Les Etats Arabes le sont-ils?

     

    Illustrations de cartes postales d'époque sur la présence française. Collection personnelle

    Lire : Amin Maalouf: "Les Croisades vues par les Arabes" Coll J'ai lu

    Lire http://www.affaires-strategiques.info/spip.php?article937 web iris)

     

     

    Résumé-Abstract : Le Printemps néo-colonial arabe. Par extraordinaire, les Etats actullement au chevet de la Syrie sont strictement les anciens Etats coloniaux de la zone  : Turquie, France, GB, et néo : les USA et alliés.

     

    Tags : Syrie, Libye, Irak,  printemps arabe, amin maalouf, usa , ottoman, Usa, Israël, choc des civilisation Huntington.

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